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CHRISTIANISME.



SECTION II[1].


Recherches historiques sur le christianisme.


Plusieurs savants ont marqué leur surprise de ne trouver dans l’historien Josèphe aucune trace de Jésus-Christ : car tous les vrais savants conviennent aujourd’hui que le petit passage où il en est question dans son histoire est interpolé[2]. Le père de Flavius Josèphe avait dû cependant être un des témoins de tous les miracles de Jésus. Josèphe était de race sacerdotale, parent de la reine Mariamne, femme d’Hérode : il entre dans les plus grands détails sur toutes les actions de ce prince ; cependant il ne dit pas un mot ni de la vie ni de la mort de Jésus, et cet historien, qui ne dissimule aucune des cruautés d’Hérode, ne parle point du massacre de tous les enfants ordonné, par lui, en conséquence de la nouvelle à lui parvenue qu’il était né un roi des Juifs. Le calendrier grec compte quatorze mille enfants égorgés dans cette occasion.

C’est de toutes les actions de tous les tyrans la plus horrible. Il n’y en a point d’exemple dans l’histoire du monde entier.

Cependant le meilleur écrivain qu’aient jamais eu les Juifs, le seul estimé des Romains et des Grecs, ne fait nulle mention de cet événement aussi singulier qu’épouvantable. Il ne parle point de la nouvelle étoile qui avait paru en Orient après la naissance du Sauveur ; phénomène éclatant, qui ne devait pas échapper à la connaissance d’un historien aussi éclairé que l’était Josèphe. Il garde encore le silence sur les ténèbres qui couvrirent toute la terre, en plein midi, pendant trois heures, à la mort du Sauveur ; sur la grande quantité de tombeaux qui s’ouvrirent dans ce moment, et sur la foule des justes qui ressuscitèrent.

Les savants ne cessent de témoigner leur surprise de voir

  1. Dictionnaire philosophique, 1764. (B.)
  2. Les chrétiens, par une de ces fraudes qu’on appelle pieuses, falsifièrent grossièrement un passage de Josèphe. Ils supposent à ce Juif si entêté de sa religion quatre lignes ridiculement interpolées ; et au haut de ce passage ils ajoutent : Il était le Christ. Quoi ! si Josèphe avait entendu parler de tant d’événements qui étonnent la nature, Josèphe n’en aurait dit que la valeur de quatre lignes dans l’histoire de son pays ! Quoi ! ce Juif obstiné aurait dit : Jésus était le Christ. Eh ! si tu l’avais cru Christ, tu aurais donc été chrétien. Quelle absurdité de faire parler Josèphe en chrétien ! Comment se trouve-t-il encore des théologiens assez imbéciles ou assez insolents pour essayer de justifier cette imposture des premiers chrétiens, reconnus pour fabricateurs d’impostures cent fois plus fortes ! (Note de Voltaire.) — Cette note a été ajoutée en 1769. (B.)