quel Dieu qui encourage toujours ses croyants comme un chef de brigands encourage sa troupe par l’espérance de la rapine ! Il est bien pardonnable, encore une fois[1], à la raison humaine de ne voir dans une telle histoire que la grossièreté barbare des premiers temps d’un peuple sauvage. L’homme, quoi qu’il fasse, ne peut raisonner autrement ; mais si Dieu en effet est l’auteur du Pentateuque, il faut se soumettre sans raisonner.
Il est plus difficile qu’on ne pense de définir les monstres. Donnerons-nous ce nom à un animal énorme, à un poisson, à un serpent de quinze pieds de long ? Mais il y en a de vingt, de trente pieds, auprès desquels les premiers seraient peu de chose.
Il y a les monstres par défaut. Mais si les quatre petits doigts des pieds et des mains manquent à un homme bien fait, et d’une figure gracieuse, sera-t-il un monstre ? Les dents lui sont plus nécessaires. J’ai vu un homme né sans aucune dent ; il était d’ailleurs très-agréable. La privation des organes de la génération, bien plus nécessaires encore, ne constitue point un animal monstrueux.
Il y a les monstres par excès ; mais ceux qui ont six doigts, le croupion allongé en forme de petite queue, trois testicules, deux orifices à la verge, ne sont pas réputés monstres.
La troisième espèce est de ceux qui auraient des membres d’autres animaux, comme un lion avec des ailes d’autruche, un serpent avec des ailes d’aigle, tel que le griffon et l’ixion des Juifs. Mais toutes les chauves-souris sont pourvues d’ailes ; les poissons volants en ont, et ne sont point des monstres.
Réservons donc ce nom pour les animaux dont les difformités nous font horreur.
Le premier nègre pourtant fut un monstre pour les femmes