Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

SUR LES OBSERVATIONS DK SCUDÉRI. 247

Enfin Chimèno est une parricide.

Non, elle n'est point parricide, et il est faux qu'elle consente expressément à épouser un jour Rodrigue. Mais que tu es en- nuyeux avec ton Aristote !

Il ne pouvoit pas le changer, ni le rendre propre au poëme dramatique. Mais comme une erreur en appelle une autre, etc.

Quelle erreur?

Ce qui, loin d'être bon dans les vingt-quatre heures, ne seroit pas sup- portable dans les vingt-quatre ans, etc.

Mais que cet agréable ami fasse réflexion que la défaite des Maures, dans les vingt-quatre heures, aplanit tous les obstacles.

Mais l'auteur du Cid porte bien son erreur plus avant, puisqu'il enferme plusieurs années dans ses vingt-quatre heures, et que le mariage de Chimène et la prise de ces rois maures, qui, dans l'histoire d'Espagne, ne se fait que deux ou trois ans après la mort de son père, se fait ici le même jour.

Il suppose toujours le mariage de Chimène, qui ne se fait point.

Le spectateur n'a-t-il pas raison de penser qu'il va partir un coup de foudre du ciel représenté sur la scène, pour châtier cette Danaïde? etc.

A quel excès d'aveuglement la jalousie porte un auteur ! Quel autre que Scudéri pouvait souhaiter que Chimène mourût d'un coup de foudre?

Cet auteur n'auroit point enseigné la vengeance.... Chimène n'auroit pas

dit:

Les acconimodemenls ne font rien en ce point, etc.

Voilà bien le langage de l'envie ! Scudéri condamne de très- beaux vers que tout le monde sait par cœur, et se condamne lui- même en les répétant.

Je découvre encore des sentiments plus cruels et plus barbares C'est

oià cette fille, mais plutôt ce monstre, etc.

Scudéri appelle Chimène un monstre ! Et on s'étonne aujour- d'hui des impudentes expressions des faiseurs de libelles !

Ce malheureux don Sanche devoit être blessé, désarmé, et, pour sauver sa vie, contraint d'accepter cette honteuse condition qui l'oblige à porter lui-même son épée à sa maîtresse de la part de son ennemi.

Remarquez que dans les mœurs de la chevalerie, et dans tous les romans qui en ont parlé, cette condition n'était point hon-

�� �