Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/52

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que celles du héros de Port-Royal peuvent l’être à un solitaire, qui ne cherche que de nouvelles raisons de haïr et de mépriser le genre humain. La philosophie de Pascal est fière et rude ; celle de notre jeune officier, douce et persuasive : et toutes deux également soumises à l’Être suprême.

Je ne m’étonne point que Pascal, entouré de rigoristes, aigri par des persécutions continuelles, ait laissé couler dans ses Pensées le fiel dont ses ennemis étaient dévorés ; mais qu’un jeune capitaine au régiment du roi ait pu, dans les tumultes orageux de la guerre de 1741, ne voyant, n’entendant que ses camarades livrés aux devoirs pénibles de leur état, ou aux emportements de leur âge, se former une raison si supérieure, un goût si fin et si juste, tant de recueillement au milieu de tant de dissipations, me cause une grande surprise.

Il a eu une triste ressemblance avec Pascal : affligé comme lui de maux incurables, il s’est consolé par l’étude ; la différence est que l’étude a rendu ses mœurs encore plus douces, au lieu qu’elle augmenta l’humeur triste de Pascal.



fin de la note sur une pensée de vauvenargues.