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ACTE I, SCÈNE II. Il

Vers oO. Mais connois Pulchérie, et cesse de prétendre.

Ce verbe prétendre exige absolument un régime : ce n'est point un verbe neutre; ainsi la phrase n'est point achevée. On pourrait dire cessez d'aimer et de haïr, quoique ce soient des verbes actifs, parce qu'en ce cas cela veut dire : cessez d'avoir îles sentiments efamour et de haine; mais on ne peut dire : cessez de prétendre, de satisfaire, de secourir.

Vers 61. J'ai forcé ma colère à te prêter silence.

Cette réponse ne fait-elle pas voir que Phocas ne devait pas se laisser braver ainsi? Le moyen de parler encore à quelqu'un qui vient de vous dire qu'il ne veut que votre mort? Comment Phocas peut-il encore raisonner amiablement avec Pulchérie après une telle déclaration ? Est-il possible qu'il lui propose encore son fils?

Vers 69. Le trône où je me sieds n'est pas un bien de race, L'armée a ses raisons pour remplir cette place; Son choix en est le titre, etc.

Un bien de race; une armée qui a ses raisons; un choix qui est le titre d'une place, toutes expressions plates ou obscures. Phocas, d'ailleurs, a très-grande raison de dire à cette Pulchérie que le trône de l'empire romain ne passe point aux filles. Mais il devait le dire auparavant, et mieux.

Vers 81 . Un chétif centenier des troupes de Mysie, Qu'un gros de mutinés élut par fantaisie...

Encore une fois, on ne parle point ainsi à un empereur romain reconnu et sacré depuis longtemps; il peut avoir passé par tous les grades militaires, comme tant d'autres empereurs, et comme Théodose lui-même, sans que personne soit en droit de le lui reprocher. Mais ce qui paraît plus répréhensible, c'est que tant d'injures et tant de mépris doivent absolument ôter à Pho- cas l'envie de donner son fils à Pulchérie, puisqu'il ne croit pas qu'Héraclius soit en vie, et qu'il n'a pas un intérêt pressant à marier son fils avec une fille qui n'aime point le fils et qui outrage le père. Il ne sera peut-être pas inutile de remarquer ici que saint Grégoire le Grand écrivait à ce même Phocas : Benigni- tatem pictatis vestrx ad impériale fastigium pervenisse gaudemus. Nous ne prétendons pas que Pulchérie dût imiter la lâche flatterie de ce pape ; ce n'est qu'une note purement historique.

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