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>32 REMARQUES SUR SOPHONISBK.

grand de tous, comme nous l'avons déjà dit 1 , était racheté par une scène semblable à celle de Sertorius et de Pompée, on pour- rait la représenter encore quelquefois.

Il ne sera pas inutile de l'aire connaître ici le style de Mairet et de tous les auteurs qui donnèrent des tragédies avant le Cid.

Syphax, dès la première scène, reproche à Sophonisbe sa (Vin me un amour impudique pour le roi Massinisse son ennemi. Je veux bien, lui dit-il, que tu me méprises, et que tu en aimes un autre; mais

Ne pouvois-tu trouver où prendre tes plaisirs, Qu'en cherchant l'amitié de ce prince numide?

Sophonisbe lui répond :

J'ai voulu m'assurer de l'assistance d'un

A qui le nom libyque avec nous fût commun.

Ce même Syphax se plaint à son confident Philon de l'infidé- lité de son épouse; et Philon, pour le consoler, lui représente

que c'est aux grandes âmes

A souffrir de grands maux, et que femmes sont femmes.

Ensuite, quand Syphax est vaincu, Phénice, confidente de Sophonisbe, lui conseille de chercher à plaire au vainqueur ; elle lui dit :

Au reste, la douleur ne vous a point éteint

Ni la clarté des yeux, ni la beauté du teint.

Vos pleurs vous ont lavée; et vous êtes de celles

Qu'un air triste et dolent rend encore plus belles.

Vos regards languissants font naître la pitié,

Que l'amour suit parfois, et toujours l'amitié;

N'étant rien de pareil aux effets admirables

Que font dans les grands cœurs des beautés misérables.

Croyez que Massinisse est un vivant rocher,

Si vos perfections ni 1 le peuvent toucher.

Sopbonisbe, qui n'avait pas besoin de ces conseils, emploie avec Massinisse le langage le plus séduisant, et lui parle même avec une dignité qui la rend encore plus touchante. Une de ses suivantes, remarquant l'effet que le discours de Sophonisbe a l'ait sur le prince, dit derrière elle à une autre suivante: Ma corn- pagne, il se prend; et sa compagne lui répond: La victoire esta nous, ou je n'y connais rien.

1. Voyez pages 191 et 221.

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