Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/409

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pas sans espérance de me faire payer deux années comptant des fermiers généraux.

J’espère que la Ville, le duc de Villars, M. de Richelieu, nous aideront ; que M. de Brezé me fera un bon contrat ; que M. Michel en fera un autre, et qu’avec cela je n’aurai plus qu’à recevoir sans peine un revenu assez fort pour vivre très-heureux dans ma charmante retraite, où les dépenses sont grandes.

On a envoyé ou renvoyé l’aube à l’abbé Dumontier, la tabatière, le thermomètre, et le physicien devrait bien nous en donner un autre.

Je tremble que ce chapitre ne me fasse baisser un peu dans votre cœur, et que le devoir ne l’emporte sur l’amitié, Mais, Dieu merci ! vous aimez vos amis comme vos devoirs.

J’ai peur de m’être trompé dans l’adresse que j’ai donnée pour M. Feuillet, procureur du roi des eaux et forêts de Saint-Quentin et de la Fère. J’ai, je crois, mis « maître des eaux et forêts d’Amiens ». C’est donc à M. Feuillet, procureur du roi des eaux et forêts de Saint-Quentin, que je prie monsieur votre frère d’envoyer une Henriade.


822. — À M. THIERIOT.
À Cirey, le 25 janvier.

Je comptais, mon cher ami, vous envoyer un énorme paquet pour le prince, et j’aurais été charmé que vous eussiez lu tout ce qu’il contient. Vous eussiez vu, et peut-être approuvé, la manière dont je pense sur bien des choses, et surtout sur vous. Je lui parle de vous comme le doit faire un homme qui vous estime et qui vous aime depuis si longtemps. Il doit, par vos lettres, vous aimer et vous estimer aussi ; cela est indubitable, mais ce n’est pas assez. Il faut que vous soyez regardé par lui comme un philosophe indépendant, comme un homme qui s’attache à lui par goût, par estime, sans aucune vue d’intérêt. Il faut que vous ayez auprès de lui cette espèce de considération qui vaut mieux que mille écus d’appointements, et qui, à la longue[1], attire en effet des récompenses solides. C’est sur ce pied-là que je vous ai cru tout établi dans son esprit, et c’est de là que je

  1. Grâce à Voltaire, Thieriot était devenu l’agent littéraire de Frédéric, auquel il manquait rarement d’envoyer les plus plats libelles publiés contre son ami et son bienfaiteur. Frédéric, étant monte sur le trône, n’en fut pas moins avare, et il paya fort mal son correspondant, ou même ne le paya pas du tout, comme le fait entendre la fin de la lettre de Voltaire à Thieriot, du 10 mars 1747. (Cl.)