Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/297

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avez eues avec dom Calmet à Senones vous avaient fait oublier la vieille affaire dont vous lui parlez encore, et que la grande dévotion dans laquelle vous aviez donné ne vous permettait plus que de penser à votre salut. M. de Maupertuis va à la messe, mais il n’a point de crucifix pendu à sa ceinture, et sa dévotion ne fait pas de bruit dans le monde.

En exécutant les ordres du roi, permettez-moi de vous renouveler les sentiments de la considération infinie avec laquelle j’ai l’honneur d’être, monsieur, etc.


2816. — À M. DUPONT,
avocat.
À Lyon, au Palais Royal[1], ce 18 novembre.

Me voilà donc, monsieur,


· Lugdunensem rhetor dicturus ad aram ;

(Juvénal, sat. i, v. 44.)


et j’ai quitté la première Belgique pour la première Lyonnaise. Il y a ici deux académies, mais il n’y a point d’homme comme vous ; je vous jure que je vous regretterai partout. J’ai quitté Colmar bien malgré moi, puisque c’est vous qui m’y aviez attiré, et vous pourrez bien m’y attirer encore. Vous trouverez bon que monsieur le premier président et madame entrent beaucoup dans mes regrets ; parlez-leur quelquefois de moi, je vous en prie : je n’oublierai jamais leurs bontés. Je vous supplie encore de vouloir bien dire à M. de Bruges combien je l’estime et combien je le regrette. Je commençais à regarder Colmar comme ma patrie ; il a fallu en partir dans le temps que je voulais m’y établir. C’est une plaisanterie trop forte pour un malade, de faire cent lieues pour venir causer, à Lyon, avec M. le maréchal de Richelieu. Il n’a jamais fait faire tant de chemin à ses maîtresses, quoiqu’il les ait menées toujours fort loin.

Il faut que je vous dise un petit mot de notre affaire concernant l’homologation de l’acte sous seing privé de M. le duc de Wurtemberg. Je pense qu’il faut attendre ; il serait piqué d’une précaution qui marquerait de la défiance. Je vous écrirai quand il sera temps de consommer cette petite affaire, qui d’ailleurs n’éclatera point ; et je tâcherai de conserver ses bonnes grâces. Gardez toujours la pancarte précieusement, aussi bien que celle

  1. Du temps de Voltaire, c’était le nom d’une auberge appelée aujourd’hui hôtel, et qui est au coin de la rue du Plat, à Lyon. (B.)