Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/361

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et par qui tout bas sont bravés
Préjugés de théologie.
Dans ce bonheur vous enclavez
Une fille jeune et jolie,
Par vos soins encore embellie,
Qu’à votre gré vous captivez,
Et qui dit, comme vous savez,
Qu’elle vous aime à la folie.

Quelle est donc votre fantaisie.
Lorsque, dans le rapide cours
D’une carrière si remplie,
Vous prétendez avoir recours
À quelque mienne rapsodie !
N’allez pas mêler, je vous prie.
Dans vos soupers, dans vos amours,
Ma piquette à votre ambrosie ;
Ah ! toute ma philosophie
Vaut-elle un soir de vos beaux jours ?


Tout ce que je peux faire, c’est de vous imiter très-humblement et de très-loin ; non pas en rois, non pas en filles, mais dans l’amour de la retraite. Je saluerai, de ma cabane des Alpes, vos palais de Champs et de Montrouge ; je parlerai de vos bontés à ce grand lac de Genève que je vois de mes fenêtres ; à ce Rhône qui baigne les murs de mon jardin. Je dirai à nos grosses truites que j’ai été aimé de celui à qui on a donné le nom de Brochet, que portait le grand protecteur[1] de Voiture, Comptez, monsieur le duc, que vous avez rappelé en moi un souvenir bien respectueux et bien tendre. La compagne de ma retraite partage les sentiments que je conserverai pour vous toute ma vie.

Ne comptez pas qu’un pauvre malade comme moi soit toujours en état d’avoir l’honneur de vous écrire.

J’enverrai mon billet de confession à M. l’abbé de Voisenon, évêque de Montrouge.


2887. — À M. THIERIOT.
À Prangins, 27 février.

Ainsi donc, mon ancien ami, vous viendrez par le coche, comme le gouverneur[2] de Notre-Dame de la Garde, Vous n’irez

  1. Voyez tome XXIII, page 397.
  2. D’après le Voyage de Chapelle et Bachaumont, ce n’est point en arrivant à Notre-Dame de la Garde, mais en retournant en cour, que Scudéri prit le coche.