Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/375

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vous en dit autant. Mille tendres respects à toute la famille des anges.


2902. — À M. TRONCHIN DE LYON[1].
Aux Délices, le 2 avril.

Nous avons joué presque toute la pièce de Zaire devant les Tronchin et les syndics : c’est un auditoire à qui nous avons grande envie de plaire. Calvin ne se doutait pas que des catholiques feraient un jour pleurer des huguenots dans le territoire de Genève. Le fameux acteur Lekain, qui nous est venu voir, nous a bien aidés ; il a plus de sentiment que de voix. Mme Denis a lu Zaïre à merveille, et j’ai fait le bonhomme Lusignan.

Monsieur, je vous sais bon gré d’aimer la tragédie. Les Tronchin ont leur raison pour cela, et tous les beaux-arts sont de leur ressort.


2903. — À M LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[2].
Aux Délices, près de Genève, le 4 avril 1755.

Nous avons eu, monsieur, celui qui a fait vos plaisirs à Dijon[3]. Il m’a fait presque oublier mes maux. Les vieux magistrats de Genève sont venus l’entendre dans ma retraite, et la sévérité de Calvin a cédé au plaisir ; c’en serait un bien grand pour moi de vous voir ici, car je désespère de pouvoir venir à Dijon cette année. Accablé de maladies et d’ouvriers, je suis continuellement occupé à me faire un assez joli tombeau ; mais j’ai bien peur qu’il ne soit trop long à faire. On n’a point ici les mêmes secours qu’en France ; on exécute mal et lentement. Je vous supplie, monsieur, de permettre que je présente ici à M. le premier président de La Marche les assurances de ma tendre et respectueuse amitié. C’est avec ces sentiments que j’ai l’honneur d’être, monsieur, etc.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Éditeur, Th. Foisset.
  3. Lekain. On assure qu’ayant risqué à Dijon, où il séjourna trois semaines, une intonation nouvelle dans un de ses rôles, il fut sifflé, et remercia le public de la leçon. Il joua dans trois pièces du théâtre de Voltaire, savoir le rôle d’Hérode dans Mariamne, celui de Zamore dans Alzire, et dans Zaire celui d’Orosmane.