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CORRESPONDANCE.

faire passer quelques épreuves des gravures ; comme ce ne sont que des épreuves, s’il y avait quelque chose qui ne vous plût pas, j’y ferai retoucher sur vos remarques, avant de faire tirer pour l’édition. La première figure, qui est destinée pour être placée devant le titre, devait vous être envoyée il y a déjà bien du temps ; mais je ne l’ai différé que parce que je voulais l’accompagner de quelques autres : c’est la même raison pour laquelle j’ai différé aussi de vous accuser la réception de l’exemplaire qui doit servir de copie pour l’impression, qui, quoique pas encore commencée, sera plus tôt faite que les gravures : je fais faire un papier exprès à Annonay par celui qui a remporté le prix proposé par le ministre chargé du département du commerce. Enfin je tâcherai de ne rien épargner pour mériter votre estime et votre amitié. J’espère que, d’après la sincérité de mes sentiments pour vous et pour vos œuvres, vous voudrez bien m’honorer d’une lettre qui satisfera les désirs que j’ai de me réconcilier avec vous. Je suis avec respect, monsieur, etc.

P. S. J’ai à vous dire, monsieur, qu’il se débite dans Paris fort souvent des ouvrages qui paraissent être de mon fonds, et que souvent je ne connais pas : ce sont des auteurs qui les font imprimer pour leur compte et les font débiter de même, en y faisant mettre mon adresse, parce que la maison a une sorte de célébrité. Je m’en suis déjà plainte, et j’espère que je parviendrai à empêcher un abus qui me compromet vis-à-vis des personnes pour qui je dois avoir toutes sortes d’égards.

6872. — À M. D’ALEMBERT.
3 mai.

M. Necker, qui part dans l’instant, mon cher et véritable philosophe, vous rendra une Lettre au Conseiller[1]. Messieurs de la poste en ont butiné deux, selon leur louable coutume. Ces messieurs de la poste aux lettres deviendront des gens très-lettrés : ils se forment une belle bibliothèque de tous les livres qu’ils saisissent. Chaque pays, comme vous voyez, a son inquisition ; vous n’êtes pas plus tôt délivré des renards que vous tombez dans la main des loups.

Votre Lettre au Conseiller devrait exciter le monde à faire une battue. Ne voudriez-vous point ajouter à l’histoire de la Destruction quelque chose concernant l’Espagne[2], en retranchant le dernier chapitre touchant le serment que devaient prêter les jésuites, chapitre devenu inutile par les précautions que l’on a prises en France contre ces pauvres diables, dignes aujourd’hui de pitié ?

  1. Opuscule de d’Alembert ; voyez tome XLIII, page 473.
  2. D’Alembert publia une Seconde lettre à M. ***, etc., sur l’édit du roi d’Espagne pour l’expulsion des jésuites. Elle circulait en juin (voyez lettre 6913).