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ANNÉE 1767

dire bien ou mal ce que Louis XIII devait faire quand il serait débarrassé de son ministre : il devait parler de l’éducation du dauphin, des négociations avec la Suède, avec le duc de Weimar et les autres princes allemands, contre la maison d’Autriche ; comment on pouvait soutenir la guerre et parvenir à une paix avantageuse ; quelles précautions il fallait prendre avec les huguenots, quelle forme de régence il était convenable d’établir en cas que Louis XIII succombât à ses longues maladies, etc.

Voilà les instructions qu’un ministre aurait données, si en effet parmi ses vanités il avait eu celle de parler après sa mort à son maître ; mais il ne dit pas un mot de tout ce qui était indispensable, et il dit des sottises énormes, dignes du chevalier de Mouhy et de l’ex-capucin Maubert, sur des choses très-inutiles.

Si vous voyez M. le chevalier de Beauteville, je vous supplie, monsieur, de vouloir bien lui présenter mes respects.

Aimez un peu, je vous en prie, un homme qui ne vous oubliera jamais.

7201. — À M. ÉLIE DE BEAUMONT.
4 mars.

Mon cher patron des infortunés, le départ de ma nièce et de la petite-nièce du grand Corneille, qui vont passer quelques mois dans votre ville, et toutes les difficultés qu’on trouve dans nos déserts quand il faut prendre le moindre arrangement, m’ont empêché de vous remercier plus tôt de votre lettre du 12 février, et de votre excellent mémoire pour ces pauvres gens de Sainte-Foy. Franchement notre jurisprudence criminelle est affreuse : les accusés n’auraient pas resté vingt-quatre heures en prison en Angleterre ; et nous osons traiter les Anglais de barbares, parce qu’ils ne sont pas si gais et si frivoles que nous ! Leurs lois sont en faveur de l’humanité, et les nôtres sont contre l’humanité.

À l’égard des Sirven, pour qui vous aviez attendri tant de cœurs, je sais qu’on a ménagé le parlement de Toulouse, à qui on n’a pas voulu ravir le droit de juger un Languedocien ; mais pourquoi vient-on de ravir au parlement de Besançon le droit de juger un Franc-Comtois ? Fantet avait été déclaré innocent par ses juges naturels ; on l’envoie à Douai, à cent cinquante lieues de chez lui, pour le faire déclarer coupable, tandis qu’on livre les pauvres Sirven, les plus innocents des hommes, à la barbarie