Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome46.djvu/176

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
CORRESPONDANCE

éclairés. Il est vrai qu’il s’y trouve plus qu’ailleurs des hommes durs et opiniâtres, incapables de se prêter un seul moment à la raison ; mais leur nombre diminue chaque jour ; et non-seulement toute la jeunesse du parlement, mais une grande partie du centre et plusieurs hommes de la tête vous sont entièrement dévoués. Vous ne sauriez croire combien tout a changé depuis la malheureuse aventure de Calas. On va jusqu’à se reprocher le jugement rendu contre M. Rochette[1] et les trois gentilshommes ; on regarde le premier comme injuste, et le second comme trop sévère. »

Mon cher ami, attisez bien le feu sacré dans votre Franche-Comté. Voici un petit ABC[2] qui m’est tombé entre les mains : je vous en ferai passer quelques-uns à mesure ; recommandez seulement au postillon de passer chez moi, et je le garnirai a chaque voyage. Je vous supplie de me faire venir le Spectacle de la Nature, les Révolutions de Vertot, les Lettres américaines sur l’Histoire naturelle de M. de Buffon ; le plus tôt c’est toujours le mieux : je vous serai très obligé. Je vous embrasse le plus tendrement qu’il est possible.

7389. — À M. LE COMTE DE FÉKÉTÉ.
14 novembre.

Monsieur, ces deux petites pièces m’étant tombées entre les mains, j’ai cru en devoir faire part à celui qui s’amuse quelquefois à en faire de meilleures. Il y a eu peut-être un M. de Saint-Didier[3] et un abbé Caille[4] ; mais je vous suis plus attaché que tous les abbés du monde. Je crois que vous me prenez pour un abbé allemand, ou pour l’abbé de Saint-Gall en Suisse, à l’énorme quantité de vin que vous m’envoyez. Vous me faites trop d’honneur, et vous avez trop de bonté pour un vieillard forcé à être sobre, si j’étais jeune, je viendrais vous faire ma cour, et boire avec vous votre bon vin ; mais je ne boirai bientôt que de l’eau du Styx.

Agréez, monsieur, mes remerciements et mes sentiments respectueux.

  1. Ministre protestant qui avait été pendu en 1762 ; voyez tome XLI, page 490.
  2. Tome XXVII, pages 311-400.
  3. Nom sous lequel Voltaire a publié sa satire intitulée le Marseillois et le lion ; voyez tome X.
  4. Voltaire a mis ce nom à ses Trois Empereurs en Sorbonne : voyez tome X.