Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/133

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Que la terre l’offense, et qu’il faut le calmer !
Tout un peuple éperdu, que la discorde excite,
Vers les parvis sacrés vole et se précipite ;
Éphèse est divisée entre deux factions.
Nous ressemblons bientôt aux autres nations.
La sainteté, la paix, les mœurs, vont disparaître ;
Les rois l’emporteront, et nous aurons un maître.

L’Hiérophante

Ah ! Qu’au moins loin de nous ils portent leurs forfaits !
Qu’ils laissent sur la terre un asile de paix !
Leur intérêt l’exige… O mère auguste et tendre,
Et vous… dirai-je, hélas ! l’épouse de Cassandre ?
Au pied de ces autels vous pouvez vous jeter.
Aux rois audacieux je vais me présenter ;
Je connais le respect qu’on doit à leur couronne ;
Mais ils en doivent plus à ce Dieu qui la donne.
S’ils prétendent régner, qu’ils ne l’irritent pas.
Nous sommes, je le sais, sans armes, sans soldats,
Nous n’avons que nos lois, voila notre puissance.
Dieu seul est mon appui, son temple est ma défense ;
Et, si la tyrannie osait en approcher,
C’est sur mon corps sanglant qu’il lui faudra marcher.


L’Hiérophante sort avec le prêtre inférieur.


Scène VI

Statira, Olympie.
Statira

Ô destinée ! Ô Dieu des autels et du trône !
Contre Cassandre au moins favorise Antigone :
Il me faut donc, ma fille, au déclin de mes jours,
De nos seuls ennemis attendre des secours,
Et chercher un vengeur, au sein de ma misère,
Chez les usurpateurs du trône de ton père !
Chez nos propres sujets, dont les efforts jaloux
Disputent cent États que j’ai possédés tous !
Ils rampaient à mes pieds, ils sont ici mes maîtres.
Ô trône de Cyrus ! ô sang de mes ancêtres !
Dans quel profond abîme êtes-vous descendus !
Vanité des grandeurs, je ne vous connais plus.