Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/200

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

490 LE TRIUMVIRAT.

In compagnon de plus, ou ([iii du moins croit l’être.

Sur le trône avec nous all’cctant de paraître,

Lépide, est un fantôme aisément écarté S

Qui rentre de lui-même en son obscurité.

Qu’il demeure pontife, et qu’il i)i’éside aux fêtes

Que Rome en gémissant consacre à nos conquêtes ;

La terre n’est qu’à nous et qu’à nos légions.

Il est temps de fixer le sort des nations ;

Réglons surtout le nôtre ; et, quand tout nous seconde,

Cessons de différer le partage du monde.

(Ils s’assej’enl à la table où ils doivent signer.) OCTAVE.

Mes desseins dès longtemps ont prévenu vos vœux ; J’ai voulu que l’empire appartînt à tous deux. Songez que je prétends la Gaule et l’Illyrie, Les Espagnes, l’Afrique, et surtout l’Italie ; L’Orient est à vous-.

ANTOINE.

Telle est ma volonté,

Tel est le sort du monde entre nous arrêté. Vous l’emportez sur moi dans ce nouveau partage ; Je ne me cache point quel est votre avantage ; Rome va vous servir : vous aurez sous vos lois Les vainqueurs de la terre, et je n’ai que des rois ^

1. Il était eu effet tel que l’auteur le dépeint ici. Le lâche proscrivit jusqu’à son propre frère, pour s’attirer l’affection de ses deux collègues, qu’il ne put jamais obtenir. Il fut obligé de se démettre de sa place de triumvir après la bataille de Philippes : il demeura pontife, comme l’auteur le dit, mais sans crédit et sans honneurs. Octave et lui moururent paisibles, l’un tout-puissant, l’autre oublié. {Note de Voltaire.)

2. Ce ne fut point ainsi que fut fait le partage dans l’île de Réno. Ce ne fut qu’après la bataille de Philippes qu’Octave se réserva l’Italie ; et ce nouveau partage même fut la source de tous les malheurs d’Antoine, et de la prospérité d’Auguste. Mais n’est-on pas étonné de voir deux citoyens débauches, dont l’un même n’était pas guerrier, partager tranquillement tout ce que possèdent aujourd’hui le sultan des Turcs, l’empereur de Maroc, la maison d’Autriche, les rois de France, d’Angleterre, d’Espagne, de Naples, de Sardaigno, les républiques de Venise, de Suisse, et de Hollande ? Et ce qui est encore plus singulier, c’est que cette vaste domination fut le fruit de sept cents ans de victoires consécutives, depuis Romulus jusqu’à César. {Note de Voltaire.)

3. On remarque en effet qu’avant la bataille d’Actium il y eut un jour quatorze rois dans l’antichambre d’Antoine ; mais ces rois ne valaient ni les légions romaines, ni même le seul Agrippa, qui gagna la bataille, et qui fit triompher le peu courageux Auguste de la valeur d’Antoine. Ce maître de l’Asie faisait peu de cas des rois qui le servaient : il fit fouetter le roi de Judée, Antigone, après quoi