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224 LE TRIUMVIRAT.

J’ai craint qu’elle ne vît une action trop noire Dans le meurtre inouï qui nous tient occupés,

FULVIE.

Elle parle avec Rome-, elle vous dit : Frappez.

Ils partent dès demain, ces destructeurs du monde ;

Ils partent triomphants : et cette nuit profonde

Est le temps, le seul temps, où nous pouvons tous deux,

Sans autre appui que nous, venger Rome sur eux.

Seriez-vous en suspens ?

POMPÉE.

Non : mes mains seront prêtes. Je voudrais de cette hydre abattre les trois têtes. Je ne puis immoler qu’un de mes ennemis : Octave est le plus grand ; c’est lui que je choisis.

naviE. Vous courez à la mort.

1’ M P É E.

Elle ennoblit ma cause. De cet indigne sang c’est peu que je dispose ; C’est peu de me yenger ; je n’aurais qu’à rougir De frapper sans péril, et sans savoir mourir.

FULVIE.

Vous faites encor plus ; vous vengez la patrie, Et le sang innocent qui s’élève et qui crie ; A ous servez l’univers.

POMPÉE.

J’y suis déterminé. L’assassin des Romains doit être assassiné. Ainsi mourut César ; il fut clément et brave ; Et nous pardonnerions à ce lâche d’Octave ! Ce que Brutus a pu, je ne le pourrais pas ! Et j’irais pour ma cause emprunter d’autres bras ! Le sort en est jeté. Faites venir Aufide,

FLLVIE.

Il veille près de nous dans ce camp homicide. Qu’on l’appelle… Déjà les feux sont presque éteints’. Et le silence règne en ces lieux inhumains.

1. On voit dans l’éloignement des restes de feux faiblement allumés autour des tentes, et le théâtre représente une nuit. {Note de Voltaire.)