Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/431

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
GOURVILLE L’AÎNÉ.

Au contraire.

NINON.

Et vos convives sont ?

GOURVILLE L’AÎNÉ.

Des docteurs très savants.

NINON.

On en trouve, en effet, de très honnêtes gens,
Et chez qui la vertu n’offre rien que d’aimable.

GOURVILLE L’AÎNÉ.

L’heure presse, avec eux je vais me mettre à table.

NINON.

Allez, c’est fort bien fait.


Scène V

Ninon, Monsieur Garant
NINON.

Quelle mauvaise humeur !
Il semble en me parlant qu’il soit rempli d’aigreur !
En savez-vous la cause ?

MONSIEUR GARANT.

Eh oui, je suis sincère,
La cause est en effet son méchant caractère.

NINON.

Je savais qu’il était et bizarre et pédant,
Mais je ne croyais pas qu’il eût le cœur méchant.

MONSIEUR GARANT.

Allez, je m’y connais ; vous pouvez être sûre
Qu’il n’est point d’âme au fond plus ingrate et plus dure.

NINON.

Il est vrai qu’en effet de mon petit présent
Il n’a pas daigné faire un seul remerciement ;
Mais c’est distraction, manque de savoir-vivre,
Et pour l’instruire mieux le monde est un grand livre.

MONSIEUR GARANT.

Je vous dis que son cœur est pour jamais gâté,
Endurci, gangrené, méchant… au mal porté ;
Faux… avec fausseté ; ses allures secrètes,
Sombres…

NINON.

riant.

Vous prodiguez assez les épithètes.