Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/436

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Vos beaux yeux, votre esprit !… Quelles puissantes armes
M’ont ôté pour jamais ma chère liberté !…
De quel excès d’amour je me sens tourmenté !…

NINON.

Mon Dieu ! finissez donc ; vous me tournez la tête :
Sortez… n’abusez point de ma faible conquête…
Mais revenez bientôt.

MONSIEUR GARANT.

Vous n’en pouvez douter.

NINON.

J’y compte.

MONSIEUR GARANT.

Sur mon cœur daignez toujours compter.
Ne trouvez-vous pas bon que j’amène un notaire
Pour coucher par écrit cette divine affaire ?

NINON.

Par contrat ! eh ! mais oui… vos desseins concertés
Ne sauraient, à mon sens, être trop constatés.

MONSIEUR GARANT.

Nos faits sont convenus ?

NINON.

Oui-dà.

MONSIEUR GARANT.

Notre fortune
Sera par la coutume entre nous deux commune ?

NINON.

Plus vous parlez, et plus mon cœur se sent lier.

MONSIEUR GARANT.

À ce soir, ma Ninon.

NINON.

le contrefaisant.

Ce soir, mon marguillier.


Scène VI

.

NINON.

Quel indigne animal, et quelle âme de boue !
Il ne s’aperçoit pas seulement qu’on le joue ;
Tout absorbé qu’il est dans ses desseins honteux,
Il n’en peut discerner le ridicule affreux.