Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/481

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NINON.

Eh ! mon Dieu, non, vous dis-je.
Gourville épouvanté dans l’instant se corrige ;
Et peut-être trompé, mais sain d’entendement,
Il fait, sans en rien dire, un second testament.
Il m’a fallu courir longtemps chez les notaires
Pour y faire apposer les formes nécessaires,
Payer de certains droits qui m’étaient inconnus :
Et, si j’avais tardé, les miens étaient perdus ;
Monsieur gardait l’argent pour son beau mariage.
Tenez, voilà, je pense, un testament fort sage :
Il est en ma faveur ; c’est pour moi tout le bien :
J’en ai le cœur percé ; monsieur Garant n’a rien.

MONSIEUR AGNANT.

Quel tour !

MADAME AGNANT.

La brave femme !

NINON., en montrant les deux Gourville.

Entre eux deux je partage,
Ainsi que je le dois, le petit héritage.
Je souhaite à monsieur d’autres engagements,
Une plus digne épouse, et d’autres testaments.

MONSIEUR GARANT.

Il faudra voir cela.

NINON.

Lisez, vous savez lire.

LE JEUNE GOURVILLE.

Il médite beaucoup, car il ne peut rien dire.

NINON., à Madame Agnant.

La dot de votre fille enfin va se payer.

MONSIEUR GARANT., en s’en allant.

Serviteur.

LE JEUNE GOURVILLE., lui serrant la main.

Tout à vous.

NINON.

Adieu, cher marguillier.

MADAME AGNANT.

Adieu, vilain mâtin, qui m’en fis tant accroire.

MONSIEUR AGNANT., le saisissant par le bras.

Et pourquoi t’en aller ? Reste avec nous pour boire.

MONSIEUR GARANT., se débarrassant d’eux.

L’oeuvre m’attend, j’ai hâte.