Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/54

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Nous présenter devant Votre Excellence,
Comme les Grecs jadis devant Cyrus…
Comme les Grecs…

LE MARQUIS.

Comme les Grecs… Les Grecs sont superflus.
Je suis Picard ; je revois avec joie
Tous mes vassaux.

LE BAILLIF.

Tous mes vassaux. Les Grecs de qui la proie…

LE CHEVALIER.

Ah ! finissez. Notre gros Mathurin,
La belle Acanthe est votre proie enfin ?

MATHURIN.

Oui-dà, monsieur : la fiançailles est faite,
Et nous prions que monseigneur permette
Qu’on nous finisse.

COLETTE.

Qu’on nous finisse. Oh ! tu ne l’auras pas ;
Je te le dis, tu me demeureras.
Oui, monseigneur, vous me rendrez justice ;
Vous ne souffrirez pas qu’il me trahisse ;
Il m’a promis…

MATHURIN.

Il m’a promis… Bon ! j’ai promis en l’air.

LE MARQUIS.

Il faut, baillif, tirer la chose au clair.
A-t-il promis ?

LE BAILLIF.

A-t-il promis ? La chose est constatée.
Colette est folle, et je l’ai déboutée.

COLETTE.

Ça n’y fait rien, et monseigneur saura
Qu’on force Acanthe à ce beau marché-là,
Qu’on la maltraite, et qu’on la violente,
Pour épouser.

LE MARQUIS.

Pour épouser. Est-il vrai, belle Acanthe ?

ACANTHE.

Je dois d’un père, avec raison chéri,
Suivre les lois ; il me donne un mari.

MATHURIN.

Vous voyez bien qu’en effet elle m’aime.