Page:Wagner - Quinze Lettres, 1894, trad. Staps.djvu/22

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affaires et la mort de sa mère bien-aimée avaient dispersé sa famille et l’avaient forcé, à peine sorti de l’enfance, seul et sans ressources, à se tirer d’affaires lui-même ; il avait commencé par donner des leçons de latin et de mathématiques, puis, une épave de la fortune paternelle recueillie plus tard, lui avait permis de poursuivre ses études. Affilié aux associations que formaient alors les étudiants, il s’était précipité avec toute l’ardeur de la jeunesse dans cette vie turbulente et romantique, mais bien plus stimulante pour l’esprit que la vie de corps qui prévaut de nos jours. Les circonstances mesquines dans lesquelles végétait l’Allemagne arrêtaient ces élans vers l’idéal sans lesquels la jeunesse s’atrophie ; c’est là ce qui peut nous faire excuser la fondation de la Société des Suicidés, née d’un accès de joyeux désespoir et sur laquelle tant de légendes ont couru. La fête de Hambach et l’attentat de Francfort ont eu des causes semblables. Wille n’avait pu s’empêcher de répondre à l’appel et de prendre part à la fête de Hambach, mais il a souvent avoué depuis que ses yeux s’étaient dessillés en face de ces agissements sans but précis, se résolvant en filandreux discours et que la leçon n’avait jamais été perdue pour lui. Par tempérament, il éprouvait le besoin d’ex-