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partie de la population du coteau Saint-Louis.

Le tocsin se mit à sonner ; les pompes se mirent en branle, et, tout ce qui ne dormait pas, à cette heure, se précipita vers le lieu du sinistre.

Notre ami Lafortune, qui était précisément en train de rentrer chez lui, fut un des premiers arrivés. La maison qui brûlait est déjà bien connue de nos lecteurs. C’est celle où le pauvre Ben avait failli passer un si vilain moment. Les cris devenaient de plus en plus forts, quand une femme s’approchant de Lafortune lui dit : « Est-ce qu’on ne va pas essayer de pénétrer dans la maison ? Cela presse, monsieur, car je crois qu’il y a du monde dedans. »

En effet, l’incendie commençait à prendre un caractère inquiétant. Des flammes rougeâtres que le vent faisait vaciller sortaient des fenêtres et léchaient l’extérieur de la maison ; les poutres craquaient, sous l’effort du feu ; les vitres se brisaient, sous l’influence de la chaleur ; et au milieu de la nuit noire, ce vaste brasier offrait un spectacle vraiment terrifiant.

Cependant le cri « les voilà ! les voilà ! » circula dans la foule. Les pompes venaient d’arriver, mais il était trop tard. Au même moment, la maison s’effondra. Il n’y eut plus qu’un vaste brasier ; et quand deux ou trois heures plus tard, il eut été éteint sous l’effort des pompes, il ne restait déjà plus, sur le sol, que quelques rares débris noirs et fumants. Lafortune, guidé par la curiosité, se rapprocha de la femme qui lui avait adressé tout à l’heure la parole, et lui demanda quelques renseignements sur la maison et sur les gens qui l’habitaient. Puis il ajouta :

— Vous vous étiez trompée ; car on n’a point entendu de cris venait de la maison ; elle devait être vide.

— Cela m’étonne, monsieur ; car je me rappelle pas avoir vu sortir les locataires.

— Savez-vous qui ils étaient ?

— Non, cette maison avait été louée par trois personnes, deux hommes et une femme assez belle et encore jeune ; elle habitait toujours cette maison, avec le plus âgé des deux hommes ; l’autre ne venait que de temps en temps ; il passait un jour ou deux avec eux, puis il sien retournait. On ne sait pas bien