Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 90 —

la naissance de la Lune à une époque antérieure ? M. Darwin a poursuivi l’intégration en arrière, jusqu’au moment où l’équateur de la Terre était incliné de 11° seulement sur l’écliptique et où la période de sa rotation était de 2h à 4h seulement. Il faudrait arrêter cette intégration à une époque moins reculée de l’histoire de la Terre ; la durée de rotation serait plus considérable, la contraction étant beaucoup moindre ; mais il faudrait aussi que l’obliquité de l’équateur sur l’écliptique fût déjà à ce moment assez considérable, puisque l’action des marées lunaires, par laquelle M. Darwin l’explique en majeure partie, n’aurait qu’une durée beaucoup moindre. Quelle serait alors l’origine de cette obliquité primitive ? Il faudrait la trouver dans l’action du Soleil sur la marée qu’il soulève sur la Terre, et à laquelle M. Darwin semble attribuer, au moins en partie, celle de 11°, qu’il suppose exister lors de la naissance de la Lune. D’autre part, la rapidité de rotation de la Terre étant beaucoup moindre, la figure de l’ellipsoïde nébuleux terrestre ne serait plus une forme instable, et la Lune ne se détacherait plus de la Terre de la façon que suppose notre auteur. Il faudrait la faire naître comme l’a admis M. Roche par exemple ; et dès lors le rôle des marées, mis en lumière d’une façon si saisissante par M. Darwin, se réduirait à une action bien moindre, éloignement progressif de la Lune, augmentation de la durée du mois et du jour, accroissement d’obliquité de l’écliptique, jusqu’à l’état actuel du système. Mais je ne dois pas oublier de faire remarquer que cette objection tirée de la durée de l’évolution, nous l’avons rencontrée se dressant contre toutes les hypothèses, aussi bien contre celles de Laplace et de M. Faye que contre l’hypothèse plus restreinte de M. G. Darwin. Elle doit donc être considérée comme s’attaquant bien plutôt à la base de l’hypothèse nébulaire elle-même qu’aux diverses manières dont cette hypothèse a pu être traitée. Elle est née de la conception que nous nous sommes faite de l’état de la nébuleuse primitive, dans laquelle nous avons voulu voir la matière à l’état le plus simple, en désagrégation complète et au zéro absolu de température. Dès lors, la chaleur engendrée par la condensation de cette nébuleuse est nécessairement limitée ; et il se trouve que l’espace de temps dans lequel cette énergie calorifique peut être dissipée n’est plus suffisant à la durée de révolution géologique de la Terre. M. Faye a cherché à allonger autant que possible cette durée