Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/50

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Les géologues de l’école uniformitaire ont calculé qu’au taux moyen de vitesse de formation actuelle des sédiments terrestres, il a fallu à la terre 500 millions d’années pour la formation et la stratification des terrains géologiques ; d’où incompatibilité des faits géologiques avec l’hypothèse nébulaire, qui ne nous fournit que 18 millions d’années en moyenne, peut-être 30 millions au maximum.

L’argument peut évidemment se retourner contre l’école des causes actuelles : puisque cette théorie conduit à admettre 500 millions d’années pour la production de phénomènes qui en réalité n’ont pas pu durer 30 millions d’années, cette théorie est inadmissible. Et je crois qu’ainsi présentée l’objection est beaucoup plus forte que la première ; car il est bien difficile d’admettre que les agents de stratification des terrains n’aient pas travaillé autrefois avec une bien plus grande activité qu’aujourd’hui, lorsque la température de la Terre était beaucoup plus élevée.

Cependant le désir de satisfaire aux besoins des géologues a conduit certains esprits à ne pas se contenter de la chaleur ainsi engendrée par la condensation de la nébuleuse primitive, considérée comme le chaos originel, et ils ont fait remonter leurs spéculations plus haut encore dans le temps. M. Croll[1] a émis en 1877 les idées suivantes :

1o « Si deux masses solides et froides, égales chacune à la demi-masse du Soleil, venaient à tomber l’une sur l’autre en vertu de leur seule attraction, la collision engendrerait une quantité de chaleur suffisante pour les réduire toutes deux en vapeur. Si on leur suppose en outre une vitesse originelle l’une vers l’autre de 202 milles par seconde, il résultera du choc 50 millions d’années de chaleur ; une vitesse de 678 milles donnerait 200 millions d’années ; une vitesse de 1 700 milles, 800 millions.

2o On peut donc supposer que la nébuleuse solaire était non pas froide à l’origine, mais à une température excessivement élevée, cette nébuleuse ayant été produite par la collision de deux masses solides froides. Toutes les étoiles actuelles tireraient ainsi leur chaleur de la rencontre de masses froides et obscures circulant dans l’espace. Les nébuleuses actuelles sont le produit des chocs

  1. Croll, On the probable origin and age of the Sun (Quarterly Journal of Science, t. LV, 1877).