Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/51

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les plus récents ; les étoiles sont le résultat de la condensation des anciennes nébuleuses.

3o Lorsque, dans la suite des temps, les soleils et leurs planètes se seront refroidis et seront devenus obscurs, il suffira de la rencontre de deux soleils éteints pour engendrer une nébuleuse nouvelle, d’où naîtront un nouveau soleil et de nouvelles planètes. Les mondes renaîtront ainsi incessamment par collision, jusqu’à ce que toute la matière qui constitue l’univers soit réunie en une masse unique, froide et obscure…

Ces idées de M. Croll sont sans doute absolument exactes au point de vue purement mécanique. Mais il faut avouer que leur introduction dans le monde physique froisse trop violemment tout ce que nous savons de la stabilité du système de l’Univers, pour qu’elles puissent être acceptées sans preuves directes, et de pareilles preuves font entièrement défaut. Nous n’avons aucun exemple de collision de deux corps : dans les systèmes d’étoiles multiples, les corps circulent les uns autour des autres sans pouvoir se rencontrer. Les vitesses mesurées sont, en général, moindres que 50 milles à la seconde (80km) et n’excèdent jamais 200 milles[1] (322km). Enfin le but que se propose l’auteur ne paraît pas devoir être atteint, car la plus grande partie de la chaleur produite par la collision serait déjà dissipée par rayonnement avant la formation des planètes et de l’étoile aux dépens de la nébuleuse, et il faudrait défalquer bon nombre des années de chaleur gagnées avant d’arriver aux âges géologiques.

Il paraît donc sage de ne pas chercher à remonter dans l’histoire des systèmes célestes au delà de la nébuleuse primitive. Celle-ci nous représente le chaos originel, c’est-à-dire la matière telle qu’elle est sortie des mains de son Créateur, avec ses propriétés et ses lois. Elle était à un état de ténuité extrême, absolument froide et animée d’un mouvement de rotation. C’est la condensation sous l’empire de la gravité qui a produit la chaleur que possède encore le Soleil et qu’ont possédée originairement les planètes. C’est la condensation encore persistante de la masse nébuleuse du Soleil qui suffit, en partie du moins, à la dépense annuelle de chaleur et

  1. Un corps qui tomberait de l’infini sur le Soleil, sans vitesse initiale, pourrait atteindre une vitesse de 563km par seconde.