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conduits à considérer les anneaux comme formés de corpuscules très petits, circulant autour de Saturne chacun avec la vitesse qui convient à sa distance à la planète, et M. Hirn a donné (p. 45 du Mémoire cité) de très intéressants détails sur le mode possible de production de pareils anneaux pulvérulents. « Leur présence, dit-il, tout exceptionnelle aujourd’hui dans notre monde planétaire, dépend de ce fait, que, pour que leur formation et surtout leur durée devinssent possibles, il fallait que l’anneau primitif fût d’une composition chimique à la fois très simple, mais particulière, capable de donner lieu à des fragments solides, isolés les uns des autres. » Un anneau de composition chimique très complexe a dû au contraire se rompre et ses parties se réunir en sphéroïdes de grandes dimensions. Ces idées de M. Hirn, absolument en accord avec celles de M. Roche, ont jeté un grand jour sur le mode de formation des planètes aux dépens des anneaux de Laplace. Il est très curieux aussi de retrouver dans les anneaux de Saturne un phénomène tout semblable à celui qui a produit, en vertu des mêmes causes, l’anneau des planètes télescopiques autour du Soleil.

M. Kirkwood a fait remarquer un autre genre d’analogie entre ces deux systèmes d’astéroïdes. De même que l’anneau de Saturne est séparé en plusieurs zones, de même, en rangeant les petites planètes par ordre de distance au Soleil, on trouve qu’elles s’agglomèrent en zones séparées par de larges intervalles vides. Comme l’a montré plus tard M. Proctor, ces vides, reconnus lorsque le nombre des planètes déjà trouvées n’excédait pas une centaine, n’ont pas été comblés par la découverte ultérieure de plus de cent trente nouveaux astéroïdes : ils semblent donc être dus à une cause naturelle. Or ces hiatus se rapportent précisément aux distances telles que, s’il y avait là une planète, la durée de sa révolution serait en rapport simple avec celle de la révolution de Jupiter. Ils correspondent donc aux points où le mouvement d’une planète subirait, de la part de Jupiter, les plus fortes perturbations. Il en est exactement de même pour l’anneau de Saturne : la division de Cassini occupe l’espace dans lequel les périodes des satellites seraient commensurables avec celles des quatre satellites de Saturne les plus voisins, Dioné, Encelade, Mimas et Téthys. De même donc que la puissante attraction de Jupiter produit les vides observés dans la zone des astéroïdes, de même l’influence perturbatrice des satellites inté-