Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/110

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Quand ils arrivèrent, au jour fixé, nous nous mîmes en route. [1] (Voir, pour les détails, Annales d’Agr., t. VIII, p. 193.)

21 Juillet. — Retour. — Quitté Jonquières, où la figure et les manières des habitants vous feraient croire qu’il n’en est pas un qui ne soit contrebandier ; nous arrivons à une superbe route que le roi d’Espagne a ordonné de faire. Elle commence aux piliers marquant la frontière des deux monarchies et se joint à la route française : elle est magnifiquement construite. Nous prenons congé de l’Espagne pour rentrer en France ; le contraste est frappant. Lorsque l’on passe la mer de Douvres à Calais, les apprêts et les embarras d’une traversée conduisent graduellement l’esprit a l’idée du changement ; mais ici, sans franchir une ville, une barrière, un mur même, vous entrez dans un nouveau monde. Une superbe chaussée, faite avec la solidité et la magnificence qui distinguent les grandes routes françaises, prend la place des misérables chemins de Catalogne, encore tels que la nature les a tracés ; de beaux ponts sont jetés sur les torrents qu’il fallait passer à gué. Nous nous trouvions tout à coup transportés d’une province sauvage, déserte et pauvre, au milieu d’un pays enrichi par l’industrie de l’homme. Tout tenait le même langage et nous disait en termes sur lesquels on ne pouvait se méprendre, qu’une cause puissante et active produisait ces contrastes, trop évidents pour être méconnus. Plus on voit, plus, selon mon opinion, on est conduit à penser qu’il n’y a qu’une

  1. Le récit de cette excursion se trouve dans le volume publié en 1860 sous le titre de Voyages en Italie et en Espagne pendant les années 1787, et 1789, trad. de M. Lesage, p. 347 et suiv. Paris, Guillaumin, in-18 de 424 p.