Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/149

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façades régulières, est vraiment magnifique. Cette superbe rue, large et bordée de trottoirs des deux côtés, coupe la ville en ligne droite, se dirigeant vers le nouveau pont, de quinze arches plates, ayant chacune 75 pieds d’ouverture. C’est un noble effort pour l’embellissement d’une ville de province. Il reste encore à bâtir quelques maisons dont les façades seules sont achevées. Des révérends pères, satisfaits de leur ancien logis, ne veulent rien dépenser pour l’exécution du plan des architectes de Tours ; on les devrait bien dénicher, s’ils s’obstinent dans leur refus, car rien de plus ridicule que ces façades sans maisons. De la tour de la cathédrale on a une vue fort étendue ; mais pour un fleuve aussi considérable que la Loire, et que l’on vante comme le plus beau d’Europe, sa beauté est bien compromise par une si grande largeur d’écueils et de bancs de sable. Il y a dans la chapelle du vieux palais de Louis XI, le Plessis-lès-Tours, trois tableaux méritant l’attention des voyageurs : une Sainte Famille, une Sainte Catherine et une Hérodiade ; ils me semblent du plus beau siècle de l’art italien. La promenade est belle, longue et admirablement ombragée par quatre rangées d’ormes majestueux et élancés, qui n’ont point d’égaux pour abriter contre un soleil brûlant ; il y en a une autre courant parallèlement sur le vieux rempart qui domine les jardins adjacents. Mais ces promenades, si longtemps l’orgueil des habitants, sont devenues des objets de pitié : le corps de ville a mis les arbres en vente, et l’on assure qu’ils seront abattus l’hiver prochain. On ne s’étonnerait pas qu’une corporation anglaise sacrifiât la promenade des dames pour une plus grande abondance de tortue, de venaison et de madère ; mais que les Français montrent aussi peu de galanterie, c’est inexcusable.