Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/211

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pas ce que vous dites », ou : « Je n’entends rien. » Entré à Guingamp par des portes, des tours, des fortifications qui paraissent de la plus vieille architecture militaire : tout annonce l’antiquité et est en parfait état de conservation. L’habitation des pauvres gens est loin d’être si bonne : ce sont de misérables huttes de boue, sans vitres, presque sans lumière ; mais il y a des cheminées en terre. J’en étais à mon premier somme à Belle-Isle quand l’aubergiste vint à mon chevet et tira le rideau en faisant tomber une pluie d’araignées, pour me dire que j’avais une jument anglaise superbe, et qu’un seigneur voulait me l’acheter. Je lui jetai à la tête une demi-douzaine de fleurs d’éloquence française pour son impertinence ; alors il jugea prudent de nous laisser en paix, moi et les araignées. Il y avait grande partie de chasse. Ce doivent être des chasseurs de première force que ces seigneurs bas-bretons pour arrêter leur admiration sur une jument aveugle. À propos des races de chevaux en France, cette jument m’avait coûté 23 guinées lors de la cherté des chevaux en Angleterre, et en avait été vendue 16 quand ils étaient un peu meilleur marché : on peut s’en faire une idée ; cependant on l’admira, et beaucoup, et souvent pendant ce voyage, et en Bretagne elle rencontra rarement d’égale. Cette province, et la même chose arrive en Normandie, est infestée de mauvaises rosses d’étalons, perpétuant la malheureuse race que l’on rencontre partout. Le vilain trou qui s’intitule la Grande-Maison est la meilleure auberge d’une station de poste sur la grande route de Brest ; des maréchaux de France, des ducs, des pairs, des comtesses, etc., etc., doivent s’y être arrêtés de temps à autre, selon les accidents auxquels on est sujet dans les longs voyages. Que doit-on penser d’un pays qui,