Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/302

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choses intéressantes de la ville. Il y en a peu : l’École militaire, pour les fils de gentilshommes sans fortune, et le couvent de Prémontré, dont la superbe bibliothèque a 107 pieds de long sur 25 de large. On me présenta à l’abbé, comme une personne ayant quelque connaissance de l’agriculture. — 17 milles.

Le 15. — J’arrivais à Nancy avec de grandes espérances, car on me l’avait donnée comme la plus jolie ville de France. Je pense qu’après tout elle n’usurpe pas sa réputation en ce qui touche à la construction, à la direction et à la largeur des rues. Bordeaux est plus grandiose, Bayonne et Nantes plus animées ; mais il y a plus d’égalité à Nancy ; presque tout en est bien, et les édifices publics sont nombreux. La place Royale et le quartier qui y touche sont superbes. — Des lettres de Paris ! tout est en désordre ! le ministère est changé, M. Necker a reçu le commandement de quitter le royaume sans bruit. L’effet sur le peuple de Nancy a été considérable. J’étais avec M. Willemet quand ses lettres arrivèrent, les curieux ne désemplissaient pas la maison ; tous s’accordèrent à regarder ces nouvelles comme fatales et devant occasionner de grands troubles. — Quel en sera le résultat pour Nancy ? — La réponse fut la même chez tous ceux à qui je fis cette question : Nous sommes de la province, il nous faut attendre pour voir ce que l’on fait à Paris ; mais il y a tout à craindre du peuple, parce que le pain est cher ; il est à moitié mort de faim, prêt par conséquent à se jeter dans tous les désordres. — Tel est le sentiment général ; ils sont presque autant intéressés que Paris, mais ils n’osent pas bouger ; ils n’osent pas même se faire une opinion jusqu’à ce que Paris se soit prononcé ; de sorte que, s’il n’y avait pas dans les débats une multitude affamée, personne