Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/38

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n’y avaient pas été conviés, selon l’euphémisme du temps.

La spéculation faite à l’aide des troupeaux était bonne ; tous les ans on envoyait s’engraisser sur les fermes des Basses-Terres les sujets préparés, mais il y avait encore des risques à courir, des soins à se donner. Lors même qu’on séparait entièrement l’industrie pastorale de toute dépendance agricole, l’intérêt supposait toujours un capital de roulement assez élevé ; ne serait-ce point un coup de maître que de supprimer pareille mise de fonds ? Et on y arriva.

Grâce au goût des citadins pour la chasse, on n’eut plus qu’à garantir aux fauves la jouissance exclusive du terrain pour que celui-ci atteignît une valeur extraordinaire. Les sportsmen se le disputèrent dans les adjudications, et les guinées remplacèrent les shillings dans le coffre-fort du grand propriétaire terrien en raison directe des capitaux qu’il enlevait à la charrue et au pâturage. Cependant, quelle que soit la fortune des nombreux amateurs, ils ne sauraient jouer au chef de clan et se donner le plaisir de chasses comme celle de la forêt de Braemar où fut concerté le soulèvement général des tribus montagnardes. Ce sont là jeux de prince. Actuellement il faut se contenter de rester blotti dans un poste à feu semblable à ceux qu’Alexandre Dumas, le père, a si spirituellement décrits dans la Chasse au chastre et y guetter avec une lunette d’approche le cerf qui vient au viandis ou à l’abreuvoir, en faisant feu chaque fois que la portée le permet. Il paraît cependant que le plaisir est vif, car (c’est un Anglais qui l’avoue avec une certaine mauvaise humeur) « en 1812 il n’y avait pas plus de cinq forêts (deer forest) en Écosse, et l’on parlait, il y a huit ans, de soixante-dix forêts couvrant une superficie de 800, 000 hectares. Ce qu’il y a de certain aussi, c’est que ce sont les terrains les plus propices au mouton que l’on convertit en parc de chasse, le mouton