Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/392

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épiscopal ; rencontré tout auprès quelque chose de mieux qu’un évêque, la plus jolie, ou plus exactement la seule jolie des femmes que nous ayons vues en Savoie. On nous dit que c’était madame de la Coste, femme d’un fermier des tabacs ; j’aurais été plus content de savoir qu’elle appartenait à la charrue. Les montagnes se montrent moins menaçantes, elles s’écartent assez pour offrir à la courageuse industrie des habitants quelque chose comme une vallée, mais le torrent, qui en est jaloux, s’en empare avec la violence du despotisme, et comme ses frères, les tyrans, il ne règne que pour ravager. Les vignes s’étendent sur quelques pentes, les mûriers commencent à paraître, les villages deviennent plus grands, mais ce sont des amas informes de pierres plutôt que des rangées régulières de maisons. Cependant à l’intérieur de ces humbles chaumières, au pied de ces montagnes couvertes de neige, où la lumière ne vient que tardivement et où la main de l’homme semble plutôt l’exclure que la rechercher, la paix et le contentement qui accompagnent une vie honnête pourraient, devraient trouver un asile, si la nature seule y faisait sentir sa misère ; le poids du despotisme peut être plus lourd encore. Par instants la vue est pittoresque et agréable, des enclos s’attachent aux parois de la montagne, comme un tableau fixé au mur d’une chambre. Les gens sont en général mortellement laids et de petite taille. La Chambre, triste dîner, couché à Aiguebelle. — 30 milles.

Le 24. — Aujourd’hui le pays devient bien meilleur, nous approchons de Chambéri, les montagnes s’éloignent, tout en gardant leur hauteur imposante, les vallées s’élargissent, les versants se cultivent, et près de la capitale de la Savoie, de nombreuses maisons de campagne