Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/415

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véhément que l’on avait d’envois d’argent faits par l’Angleterre pour jeter le trouble dans le royaume. Le comte de Thiard, cordon bleu, qui commande en Bretagne, mentionna ce seul fait que certains régiments en garnison à Brest, dont la conduite avait toujours été bonne et sur lesquels on pouvait faire autant de fonds que sur aucun autre de l’armée, avaient changé tout d’un coup d’allures, par suite de distributions d’argent considérables. L’un des députés, demandant à quelle époque cela avait eu lieu, il lui fut répondu que c’était tout dernièrement ; sur quoi il fit observer immédiatement que cela suivait l’envoi de 1,100,000 liv. (48,125 l. st.) par l’Angleterre, qui avait occasionné tant de conjectures et de conversations. Cet envoi, dont on s’était particulièrement préoccupé, était si mystérieux et si obscur, que le fait seul avait pu être découvert ; toutes les personnes présentes m’en attestèrent l’exactitude. D’autres n’hésitaient pas à joindre ces deux rapports et à les croire dépendants l’un de l’autre. Je fis remarquer que, si l’Angleterre était réellement mêlée à cette affaire, ce qui me paraissait incroyable, on devait présumer que c’était dans son propre intérêt ou selon les intentions supposées de son roi, ce qui se trouvait être alors la même chose exactement : si on envoyait de l’argent, ce serait donc pour soutenir un trône menacé et non pas pour en détacher les fidèles serviteurs. Dans ce cas, ce serait sur Metz que seraient dirigés les fonds, afin de maintenir les troupes dans leur devoir, et non pas sur Brest, afin de les corrompre ; l’idée serait trop absurde. Tous semblèrent admettre la justesse de cette remarque, mais ne s’en tinrent pas moins convaincus des deux faits, qu’ils fussent ou non en relation entre eux. Au dîner, selon l’usage, la plupart des députés, surtout