Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Un homme net comme l’or, ton père ; juste comme la balance du pharmacien ; qu’a jamais fait tort à personne et que le sous-préfet lui tire son chapeau quand il vient au Comice. D’où, mon Dieu ! d’où qu’ils ont eu, ces parents-là, une vermine comme vous, que demain à cette heure-ci, vous serez à vous dire : « Qui que nous avons fait de tuer cette pauvre bonne femme ! »

Un phénomène s’est passé. Les deux jeunes gaillards qui arrivaient ivres de leur férocité, emportés par le mouvement propulseur d’une résolution péniblement prise, d’abord, mais douée maintenant de tout l’élan acquis, ont reçu un choc. L’effort mis en œuvre pour enfoncer la porte devait normalement les conduire jusqu’à l’accomplissement immédiat du meurtre, en un seul temps. Une autre force est intervenue là, dès l’entrée, quand la vieille a dit : « Vous avez donc point de grand’mère ? » Avant même : quand elle les a regardés de ses larges prunelles chaudes, si chargées du fluide de son âme.

Seize ans ! Dix-sept ans ! Ils ont cet âge où l’homme adolescent n’est qu’un chaos. Il y a, dans cet âge, un instant fatidique où le jeune être en formation est moins une personne qu’un prélèvement sur l’espèce, un gabarit où apparaissent toutes les possibilités de l’homme dans le mal