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DISCOURS


devoient partir le ſoir pour rejoindre l’armée de M. de Buſſy, qui étoit à une journée de là. La maniere affectueuſe dont ils me reçurent, avoit quelque choſe de touchant. La plûpart de ceux qui etoient préſens, m’avoient vu deux ans auparavant à Pondichery avec un teint de lys & de roſe, & ne m’auroient pas reconnu, ſi je ne m’étois nommé. M. Law me fit changer de linge (c’étoit la premiere fois depuis Moxoudabad) : je mis une cabaye d’un de ſes Dobachis, & commençai à reſpirer, en me voyant avec des François & même avec des perſonnes ſur l’amitié deſquelles je pouvois compter. J’appris en même tems que mon frere (celui qui eſt maintenant Chef du Comptoir François du Surate) étoit à Pondichery. Cette nouvelle ranimant mon courage, me détermina à hâter mon voyage. Mon Tatou fut alors réformé. M. Law me donna un de ſes chevaux. Nous partimes le ſoir, paſsâmes la riviere de Schikakol dans un endroit où elle étoit guéable, quoiqu’aſſez difficilement (les chevaux d’une petite taille traverſent cette riviere à la nage ; on paſſe les canons, de quelque groſſeur qu’ils ſoient, ſur des radeaux portés ſur des outres), & arrivâmes à l’armée ſur le minuit. Je fus coucher chez M. Deſcroutes, Capitaine dans le Bataillon Allemand, qui voulut bien partager ſa Tente avec moi. La fatigue ou le changement de ſituation firent ſur moi une telle impreſſion, que je me trouvai mal en arrivant. Quelques verres de bonne liqueur me remirent les ſens, & je dormis tranquillement le reſte de la nuit.

Il fut queſtion le lendemain d’aller chez M. de Buſſy. On lui avoit dit qu’il étoit arrivé du Bengale un François qui avoit à lui parler de la part de M. Law, Chef de Callimbazar. J’avois cru devoir ſoutenir mon perſonnage à Schikakol, parce que les explications étoient impoſſibles devant vingt perſonnes, & qu’il étoit important de former les premieres impreſſions en ma faveur : mais il falloit enfin que le maſque tombât. Je ſçavois que M. de Buſſy avoit demandé pluſieurs fois s’il ne me verroit pas bientôt. Je me rendis ſur les cinq heures à la Tente du Général. L’accueil qu’il me fit, fut des plus gracicux ; ſuppoſant que j’a-