Page:Zola - Travail.djvu/148

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Jordan avait tourné un bouton, et la salle entière s’égayait d’un pot de lumière électrique.

« M’y voici donc, je ne suis décidément à l’aise que chez moi… Et, vous savez, l’accident qui m’a forcé de partir pour trois jours, s’est justement produit au moment où une expérience me passionnait. Je vais reprendre ça… Mon Dieu ! que je me sens bien ! »

Il continuait de rire, plus rose, plus animé que d’habitude. Et, s’allongeant à demi sur le divan, dans une pose de songerie qui lui était familière, il força Luc à s’y asseoir également.

« Dites donc, mon bon ami, nous avons, n’est-ce pas ? le temps de causer des choses qui m’ont donné un tel désir de vous voir, que je me suis permis de vous faire venir. Il est nécessaire, d’ailleurs, que Sœurette soit là, car elle est d’excellent conseil ; et, si vous le voulez bien, nous attendrons d’avoir dîné, ce sera pour le dessert… Ah ! que je suis heureux de vous tenir là, en face de moi, pour vous dire en attendant où en sont mes recherches. Ça ne va guère vite, mais je travaille, et vous le savez, c’est la grande affaire, il suffit qu’on travaille deux heures par jour, pour que le monde soit conquis. »

Et le silencieux parla, raconta ses travaux, qu’il ne confiait à personne, excepté aux arbres de son parc, ainsi qu’il le disait plaisamment. Le four électrique pour la fonte des métaux étant déjà trouvé, il n’en avait d’abord cherché que l’application pratique à la fonte du minerai de fer. En Suisse, où la force motrice des torrents permet des installations peu coûteuses, il avait visité des fours qui fondaient de l’aluminium dans d’excellentes conditions. Pourquoi ne fondrait-on pas ainsi le fer ? Il ne s’agissait, si l’on voulait résoudre le problème, que d’appliquer les mêmes principes à un cas déterminé. Les hauts fourneaux actuels ne produisent guère que seize cents degrés de chaleur, tandis qu’on en obtenait deux mille