Page:Zola - Travail.djvu/278

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après avoir embrassé tout le monde, la mère conclut  :

«  C’est bien simple, je vais faire murer la porte, je serai sûre ensuite que nos enfants ne communiqueront plus. Rien n’est mauvais comme ces jeux de gamins, ils prennent la peste ensemble.  »

Ni Delaveau, ni Boisgelin, n’étaient intervenus, ne voyant là que des enfantillages, mais acquis aux mesures sévères, pour le bon ordre. Et l’avenir germait, Nise têtue emportait dans son petit cœur l’image de Nanet, qui était drôle et qui jouait si gentiment.

Enfin, les convives arrivèrent, les Gourier avec Châtelard, puis le président Gaume avec le jeune ménage Jollivet. Selon son habitude, l’abbé Marle parut le dernier, en retard. On était dix les Marelle, qu’un obstacle retenait, avaient formellement promis de venir prendre le café. Fernande mit à sa droite le sous-préfet, et le président à sa gauche, tandis que Delaveau s’asseyait entre les deux seules dames, Léonore et Lucile. Aux deux bouts se trouvèrent Gourier et Boisgelin, l’abbé Marle et le capitaine Jollivet. On avait voulu être en tout petit comité, pour causer plus à l’aise. D’ailleurs, la salle à manger, dont Fernande avait honte, était si étroite, que le vieux buffet d’acajou gênait le service, dès qu’on était plus d’une douzaine.

Dès le poisson, des truites délicieuses de la Mionne, la conversation tomba nécessairement sur la Crêcherie et sur Luc. Et ce que disaient ces bourgeois instruits, en position de connaître ce qu’ils appelaient l’utopie socialiste, n’était guère plus sage ni plus intelligent que les extraordinaires appréciations des Dacheux et des Laboque. Le seul qui aurait pu comprendre était Châtelard. Mais il plaisantait.

«  Vous savez, les garçons et les filles poussent en commun, dans les mêmes classes, dans les mêmes ateliers, et j’espère dans les mêmes dortoirs, de sorte que