Page:Zola - Travail.djvu/382

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deux une force nouvelle… Tous les autres liens sont dénoués, je suis ta femme devant tous, ma place est ici, à ton chevet.  »

Il était si ému, si pénétré de joie, que des larmes parurent dans ses yeux.

«  Ah  ! chère, chère Josine, c’est l’amour et c’est le bonheur qui entrent ici avec toi.  »

Mais, tout d’un coup, il se souvint de Sœurette. Il leva les yeux, il la retrouva toute droite, de l’autre côté de son lit, un peu pâle, souriante pourtant. D’un regard d’affection, il lui sourit de nouveau.

«  Ma bonne Sœurette, c’était un secret que j’avais dû vous cacher.  »

Elle eut un petit frisson, elle dit simplement  :

«  Oh  ! je savais, j’avais vu Josine, un matin, sortir de chez vous.

— Comment, vous saviez  !   »

Et il devina tout, il eut pour elle une pitié, une admiration, une adoration infinies. Son renoncement, cet amour qu’elle lui gardait, qu’elle lui témoignait en une tendresse sans bornes, en un don de sa vie entière, le touchait et l’exaltait comme l’acte du plus haut, du plus pur héroïsme. Doucement, presque à l’oreille elle dit encore  :

«  Soyez sans crainte, Luc, je savais, je ne serai jamais que la plus dévouée et la plus fraternelle des amies.

— Ah  ! Sœurette, répéta-t-il d’un souffle presque indistinct, ah  ! divine et triste amie  !   »

En le voyant si las, le docteur Novarre intervint, lui défendit absolument de parler. Il s’égayait discrètement, l’aimable docteur, de tout ce qu’il apprenait là. C’était très bien que son blessé eût une sœur, une femme, pour le soigner, mais il fallait être raisonnable, ne pas se donner la fièvre par trop d’émotion. Et Luc promit d’être très sage, ne parlant plus, ne jetant plus que des regards