Page:Zola - Travail.djvu/483

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aujourd’hui à la mère, entourée de ses petits, tout ce foyer pour lequel il combattait maintenant, en pacificateur des terres conquises. Et, quand même, ils s’aimaient toujours en amants, l’amour ne vieillit pas, il reste l’éternelle flamme, le brasier immortel où s’alimente l’existence des mondes. Jamais maison n’avait retenti d’une joie si claire, pleine d’enfants et de fleurs. On s’y aimait si fort, avec une telle gaieté sonnante, que le malheur n’entrait plus. Et, lorsqu’un souvenir du douloureux passé revenait, lorsque Josine se rappelait ses souffrances, la chute où elle aurait achevé de périr, sans la main secourable de Luc, c’était pour se jeter à son cou, d’un élan d’inépuisable gratitude, tandis que lui, ému, la sentait lui devenir plus chère, de tout cet opprobre inique dont il l’avait sauvée.

«  Ah  ! que je t’aime, mon bon Luc  ! et comment te remercierai-je jamais assez de m’avoir faite si digne, si heureuse  ?

— Chère, chère Josine  ! c’est moi qui dois t’aimer de toute ma reconnaissance  ; car, sans toi, rien de ce que j’ai fait n’aurait pu être.  »

Et ils étaient comme épurés l’un et l’autre par cette création de justice et de paix qui sortait d’eux, ils disaient encore  :

«  Il faut aimer les autres comme nous nous aimons, c’est la même flamme qui rapproche tous les êtres, notre bonheur d’amants et d’époux ne saurait durer que dans le bonheur de tous. Divin amour, puisque rien ne peut vivre que par toi, aide-nous donc à finir notre œuvre, embrase les cœurs, fais que tous les couples de la Cité aiment et enfantent, dans l’universelle direction qui doit tous nous unir  !   »

C’était ce qu’ils appelaient en riant l’oraison de la nouvelle religion de l’humanité. Et, chez eux à ce foyer parfumé de tendresse, la fleur d’amour avait déjà fleuri délicieusement pendant les