Page:Zola - Travail.djvu/511

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son Dieu semblait mourir un peu chaque jour, et il mourrait avec lui, lorsque la vieille maison divine se fendrait de toutes parts et le broierait, sous le poids du grand christ, attaché au mur. Et ils auraient le même tombeau, dans la terre où tout retourne.

D’ailleurs, Mme Mazelle était bien trop bouleversée par ses soucis personnels, pour s’intéresser en ce moment au sort douloureux de l’abbé Marle. Si une solution n’intervenait pas, elle craignait d’en tomber sérieusement malade, elle qui avait tiré tant d’heures cajolées et tendres de la maladie innommée, dont s’était embellie son existence. Tous ses invités se trouvant là, elle avait quitté son fauteuil pour servir le thé, qui fumait dans la claire porcelaine, tandis qu’un rayon de soleil dorait les petits gâteaux, sur leurs assiettes de cristal, à profusion. Et elle hochait sa grosse tête placide, elle n’était point convaincue.

«  Vous avez beau dire, mes amis, c’est vraiment la fin du monde, ce mariage, et je ne puis m’y décider.

— Nous attendrons encore, déclara Mazelle, nous lasserons la patience de Louise.  »

Mais le ménage resta saisi, Louise en personne était debout devant eux, à l’entrée du berceau, parmi les roses ensoleillées. Ils la croyaient dans sa chambre, sur sa chaise longue, souffrante de ce mal sans nom, que le mari aimé et désiré pouvait seul guérir, selon l’ordonnance du docteur Novarre. Elle devait s’être doutée qu’on décidait de son sort, et elle avait simplement passé un peignoir à petites fleurs rouges, en se contentant de nouer ses beaux cheveux noirs. Descendue ainsi à la hâte, toute vibrante de la continuelle passion qui l’animait, elle était charmante, avec sa figure mince, où luisaient ses yeux un peu obliques, dont le chagrin lui-même ne pouvait éteindre la gaie lumière. Elle avait entendu les dernières paroles de ses parents.