Page:Zola - Vérité.djvu/461

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président leur avait montré une lettre reçue à l’instant, après la clôture des débats, la fameuse lettre de Simon à un ami, suivie d’un post-scriptum, puis d’un paraphe, absolument semblable à celui du modèle d’écriture. C’était à cette pièce qu’avait fait allusion le père Philibin, dans sa déposition sensationnelle, lorsqu’il s’était écrié qu’il avait eu sous les yeux la preuve de la culpabilité de Simon, sans pouvoir en dire davantage, étant lié par le secret confessionnel. Et l’on venait d’établir que, si le corps de la lettre était bien de l’écriture de Simon, le post-scriptum et le paraphe constituaient à coup sûr le faux le plus impudent, un faux même grossier auquel un enfant n’aurait pu se laisser prendre.

Aussi David, et Marc trouvèrent-ils Delbos triomphant.

— Eh bien ! ne vous l’avais-je pas dit ? Voilà la communication illégale désormais prouvée ! Jacquin vient d’écrire au président de la Cour de cassation, en confessant la vérité et en demandant à être entendu… Cette lettre de Simon, je la savais au dossier, Gragnon n’ayant point osé la détruire. Mais que de peine pour l’en tirer et pour en faire expertiser l’écriture ! Je flairais le faux, je sentais là-dedans la main du terrible père Philibin… Ah ! cet homme, il avait l’air si lourd, si commun, et plus j’avance dans l’affaire, plus je le sens grandir en souple génie de ruse et d’audace. Vous le voyez, il ne s’était pas contenté d’arracher le coin timbré du modèle d’écriture, il avait aussi falsifié une lettre de Simon, en s’arrangeant pour qu’elle décidât le jury au dernier moment, car ce faux est sûrement son œuvre.

David, si souvent déçu, gardait une crainte.

— Mais demanda-t-il, êtes-vous bien convaincu que ce Jacquin, cet architecte diocésain, à la merci des prêtres, marchera jusqu’au bout ?

— Absolument convaincu… Vous ne connaissez pas Jacquin.