Page:Zola - Vérité.djvu/505

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d’un prélat libéral, tel que Mgr Bergerot, tenant en échec la congrégation, dans la crainte douloureuse de voir l’Église submergée, emportée, par le flot montant des basses superstitions. La lutte, cette fois, s’était enragée, empoisonnée, au fond des affreuses ténèbres où cheminent les grands crimes sociaux ; et elle continuait en assassine, sous la morne paix de la ville morte, elle n’apparaissait guère à la surface qu’en un bouillonnement trouble, cette terreur qui soufflait par les rues, comme au travers des cités pestiférées. L’angoisse de Marc venait justement de là, de ne pas revoir le heurt retentissant des simonistes et des anti-simonistes, d’assister aux préparatifs scélérats d’un ténébreux égorgement, dont un Guybaraud et un Pacart lui semblaient devoir être les instruments nécessaire et choisis.

Cependant, chaque soir, David et Delbos se retrouvaient chez Marc, dans la grande pièce que celui-ci avait louée, au fond d’une rue solitaire, et des amis ardents, venus de toutes les classes, les entouraient. C’était la petite phalange sacrée, chacun y apportait ses nouvelles, ses idées, son courage. On ne voulait pas désespérer, on se séparait ragaillardis, prêts à de nouveaux combats. Et ni Marc ni les autres n’ignoraient que, dans une rue voisine, chez un beau-frère de l’ancien président Gragnon, se tenaient les conciliabules de la bande ennemie. Gragnon, cité comme témoin par la défense, était descendu là, et il recevait les anti-simonistes militants de la ville, tout un flot de soutanes et de frocs qu’on voyait, dès la nuit close, discrètement s’y engouffrer. Le père Crabot, disait-on, y avait couché deux fois, puis était retiré à Valmarie, où il se terrait dans la pénitence, avec une grande ostentation d’humilité. Des figures louches rôdaient au fond de ce quartier désert, les rues n’y étaient pas sûres. Aussi, lorsque David et Delbos sortaient de chez Marc, la nuit, leurs amis les accompagnaient-ils en