Page:Zola - Vérité.djvu/714

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de l’ancienne masure douloureuse de la rue du Trou, riait gaiement au soleil, avec les guirlandes de verdure et de fleurs dont elle était décorée. Et, brusquement, le voile qui cachait encore l’inscription, au-dessus de la porte, fut enlevé, et la plaque de marbre apparut, avec les mots flamboyants, en lettres d’or : « La ville de Maillebois, à l’instituteur Simon, pour la vérité et la justice, en réparation de ses tortures. » Puis la signature suivait, plus haute et plus éclatante : « Les petits-fils de ses bourreaux. » Et, de la vaste place, de l’avenue voisine, des fenêtres et des toits, une immense et dernière acclamation s’éleva, roula comme un tonnerre, dans laquelle s’unissaient enfin tous les cœurs du peuple, sans qu’une seule protestation désormais osât méconnaître la vérité et la justice triomphantes.

Le lendemain, il y eut dans Le Petit Beaumontais, un compte rendu enthousiaste de la cérémonie. Depuis longtemps, l’immonde journal s’était transformé sous le souffle nouveau qui haussait le niveau moral et intellectuel de ses lecteurs. Il avait fallu en balayer, en désinfecter les bureaux comme des sentines, engorgées de tant de poisons depuis des années. La presse doit devenir le plus admirable instrument d’instruction, lorsqu’elle ne sera plus aux mains des bandits politiques et financiers, abêtissant et détroussant leur clientèle. Et Le Petit Beaumontais, renouvelé, rajeuni, commençait à rendre de grands services, aidait chaque jour à faire plus de lumière, plus de raison et de bonté.

Puis, quelques jours plus tard, un terrible orage, un de ces orages de septembre qui brûle tout, détruisit la chapelle des Capucins. Elle était la dernière ouverte, fréquentée encore par un assez grand nombre de dévotes. À Jonville, l’abbé Cognasse venait d’être trouvé mort dans la sacristie, frappé de congestion cérébrale, à la suite d’un accès d’effroyable colère ; et l’église, vide depuis longtemps, était