Une leçon de morale/I/L’heure embrasse le silence
< Une leçon de morale | I
L’HEURE EMBRASSE LE SILENCE
Au mal :
Répétons cloches de poison
Les raisons
De la plus hideuse des peines
Les raisons
De la plus hideuse des peines
Elles sont gravées dans le marbre
De la mère des tombeaux
De la mère des tombeaux
Gravées sur les palmes de pierre
De la mort qui me travaille
De la mort qui me travaille
J’aime la mère des tombeaux
D’un amour voué au mal
Un vieil amour mauvais au goût
D’un amour voué au mal
Un vieil amour mauvais au goût
⁂
On arrive à son lit par une rue tranquille
Bordée de maisons grises comme toutes les maisons
Bordée de maisons grises comme toutes les maisons
Une tranquille rue rouillée
Qui n’a jamais été jeune
Qui n’a jamais été jeune
Et là le désespoir poète
Le désespoir qui se respecte
A le visage comme un œuf
Le désespoir qui se respecte
A le visage comme un œuf
Et de se voir dans le ruisseau
Son cœur noble se soulève
Son cœur noble se soulève
Le poète n’a plus de germe
Pour tricher avec le temps
Pour tricher avec le temps
Le poète n’a plus de langue
Pour lécher sa mélancolie
Les images sont au secret
Pour lécher sa mélancolie
Les images sont au secret
⁂
Ma fausse perle fine
Si tu pouvais mendier ton pain
Si tu pouvais mendier ton pain
Pour être humain la voix te manque
Nul ne te voit riche ni pauvre
Tu n’as ni fièvre ni santé
Nul ne te voit riche ni pauvre
Tu n’as ni fièvre ni santé
Tu n’es pas mieux que rien mais que veux-tu tu es
Ta solitude vide l’urne de ton corps
Ta solitude vide l’urne de ton corps
Tu es aux yeux des autres comme un figurant
La façade le gant le monument le masque
La façade le gant le monument le masque
Encore si c’était vengeance de la vie
Mais non le mal ne tient ni à toi ni aux autres
Mais non le mal ne tient ni à toi ni aux autres
Et dans la douceur triste de ton passé clos
L’amour le plus mortel n’égale que son deuil
L’amour le plus mortel n’égale que son deuil
⁂
Mère la mort est authentique et véritable
Ses rayons font les morts éternellement morts
Ils sont autour de mon amour voué au mal
Ses rayons font les morts éternellement morts
Ils sont autour de mon amour voué au mal
Nul aviron sous terre et nul fleuve à franchir
Pour comprendre l’espace et marquer la présence
Pour comprendre l’espace et marquer la présence
Vivre n’est que d’aller d’un corps à son néant
De la forme à la nuit et du sens à l’oubli
De la forme à la nuit et du sens à l’oubli
Vivre c’est tout manquer et manquer à soi-même
Puisque je meurs dans ce que j’aime à tout instant
Puisque je meurs dans ce que j’aime à tout instant
Je ne me suis jamais tué mais on me tue
Je laisse l’illusion aux pleutres aux profanes
Je laisse l’illusion aux pleutres aux profanes
Et la démence est faite fée par le chagrin
L’aveugle a vu sa chair décroître
L’aveugle a vu sa chair décroître
Ruines vous êtes entières
Dans le champ de ma vision
Comme à plaisir décharnée
Comme à douleur annulée.
Dans le champ de ma vision
Comme à plaisir décharnée
Comme à douleur annulée.
Au bien :
De sa bouche bâillonnée
L’heure embrasse le silence
L’heure embrasse le silence
Une abeille roule au sol
Avec mille de ses sœurs
Avec mille de ses sœurs
Et mille abeilles remontent
Vers la fleur qui les convoque
Vers la fleur qui les convoque
⁂
Douloureuses langoureuses
Les hirondelles du soir
Les hirondelles du soir
Perpétuent une famille
Qui ne connaît que chaleur
Qui ne connaît que chaleur
Une seule saison sonne
Un seul souci de bonheur
Un seul souci de bonheur
⁂
La lune se multiplie
Dans un arbre en proie au gui
Dans un arbre en proie au gui
Au gui qui se multiplie
Au ventre qui reproduit
Au ventre qui reproduit
Et l’arbre en est rajeuni
Et la vie est infinie
Et la vie est infinie
⁂
L’homme arrache le bâillon
Et son cœur combat les heures
Et son cœur combat les heures
Et sa tête les confond.