À l’ombre de mes dieux/Orgueil

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À l’ombre de mes dieuxLibrairie Garnier frères (p. 15).
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ORGUEIL


 
Je me suis enivré de la rose et du miel.
Je fus, jadis, l’enfant rêveur dont la pensée,
Pareille au ruisseau pur, formé par l’eau du ciel,
Court, des mille reflets de l’heure nuancée ;

Mais la vie est venue y mélanger son fiel,
La ville a confisqué, de sa pluie amassée,
Le blanc rayon de lune où jouait Ariel,
Alors, j’ai fui la ville infâme et sa nausée.

Je me suis exilé dans l’Espace et le Temps
Et j’ai déverrouillé le Mystère, écoutant
L’écho des voix qui roule aux longs couloirs des âges ;

Et je garde, aujourd’hui, par orgueil, prisonniers,
Dans mon sang, le stérile éclat des mers sauvages
Et l’âpreté des vents qu’on respire aux glaciers.