À tire-d’aile (Jacques Normand)/12

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Calmann Lévy, éditeur (p. 57-58).

XI

HARPES ÉOLIENNES.


Sur les sombres sapins, océan de verdure,
La lune verse à flots ses mouvantes clartés ;
Un immense sommeil plane sur la nature,

Tous les bruits se sont arrêtés.


Seule, aux baisers du vent, la harpe éolienne
Dans la nuit qui se tait jette son long soupir :
On dirait les accents de quelque voix humaine

Qui se réveille pour gémir.


Je pense, en entendant ces tristes harmonies,
Aux âmes, sœurs en Dieu, par des liens secrets,
Par d’invisibles nœuds dès leur naissance unies,

Et qui ne se trouvent jamais.


Mêmes sont leurs désirs et même est leur tendresse ;
Les cordes des deux cœurs vibrent au même vent :
Mais ces soupirs jumeaux, voulant s’unir sans cesse,

S’éloignent éternellement.