Élémens de chimie/Partie 2/2

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Imprimerie de Jean-François Picot (p. 63-135).
SECONDE CLASSE.


DE LA COMBINAISON ET DU MÉLANGE DES TERRES PRIMITIVES ENTR’ELLES, OU MÉLANGES TERREUX.


Les terres pures et simples, telles que nous les avons décrites, se trouvent rarement à la surface du globe ; elles y sont constamment mélangées entr’elles, et forment des masses plus ou moins volumineuses, plus ou moins dures, selon la nature des terres, leur division et le caractère des matières étrangères qui leur sont combinées, telles que le fer, les bitumes, etc.

On conçoit que le nombre des compositions qui peuvent résulter du mélange de cinq terres primitives seroit infini, si on avoit égard aux légères variétés qui dépendent des proportions dans les mélanges ; mais je ne considérerai, comme espèces vraiment distinctes, que les seules substances où il n’y a pas identité de principes constituans : les nuances dans les proportions de ces principes peuvent apporter des modifications dans la forme, la dureté, la couleur, etc. mais ne constituent jamais que des variétés.

Nous déduirons naturellement le genre, de la pierre ou terre qui prédomine dans le mélange et paroît donner son caractère à l’ensemble ou au tout : c’est ainsi que nous classerons, parmi les mélanges calcaires, les pierres qui nous présenteront les propriétés de la pierre à chaux, à tel point, qu’on les croiroit purement calcaires si l’analyse n’y démontroit l’existence d’autres principes.

Le genre ne doit pas être pris et déduit à la rigueur du principe terreux qui domine ; car souvent le caractère de l’ensemble ou du mélange est donné par une terre qui ne forme pas le principe le plus abondant, comme nous le voyons sur-tout dans les pierres magnésiennes, où la silice domine sur la magnésie.


PREMIER GENRE.


Mélanges calcaires.


D’après les principes que nous venons de poser, nous devons placer ici les mélanges de pierres, où les propriétés de la pierre à chaux prédominent.


Ire.. Espèce. Pierre à chaux et magnésie.


Ce mélange est assez commun ; presque toutes les pierres calcaires contiennent de la magnésie : M. Bayen en a décrit une variété, dans le Journal de Physique tom. 13, qui contient, par quintal, 75 carbonate de chaux, 12 magnésie et 13 de fer ; c’est la terre de Creutzwald : M. Woulf en a fait connoître une autre variété, dans les Transactions philosophiques, année 1779 ; elle a fourni, 60 carbonate de chaux, 35 carbonate de magnésie, 3 de fer.

L’analyse que j’ai faite de plusieurs pierres à chaux de notre Province, m’a présenté constamment de la magnésie.


IIde. Espèce. Pierre à chaux et barite.


M. Kirwan nous a appris que cette espèce se trouvoit dans le Derbyshire, sous forme de pierre, et dans l’état terreux ; elle est d’une couleur grise, et plus pesante que les pierres à chaux ordinaires.


IIIe. Espèce. Carbonate de chaux et alumine.


Ce mélange est assez commun ; il est connu vulgairement sous le nom de marne : les proportions des deux principes constituans varient à l’infini ; c’est ce qui établit les marnes grasses ou maigres, et les dispose à servir d’engrais à telle ou telle nature de terrain ; les marnes sont presque toujours colorées par le fer.

Elles paroissent provenir de la décomposition des mélanges naturels de craie et d’argile, et contiennent plus ou moins de silice ; mais l’analyse que j’ai faite, il y a six ans, de toutes les marnes que j’ai pu me procurer, m’a convaincu que ce n’étoit souvent qu’un mélange d’argile et de craie : j’ai également trouvé de la magnésie dans les marnes, quelquefois même jusqu’aux  ; mais, en général, on peut les regarder comme formées essentiellement par les deux terres dont nous venons de parler.

L’alumine se trouve encore mêlée avec le carbonate de chaux dans les marbres : M. Bayen l’a prouvé, dans le Journal de Physique, tom. 2 ; et j’ai confirmé la vérité de ces résultats par l’analyse de plusieurs marbres de notre Province : c’est même à ce principe que l’on doit rapporter le poli graisseux que prennent quelques-uns.

La différence bien marquée qu’on peut établir, entre les mélanges qui forment la marne et le marbre, c’est que le premier est le produit immédiat de la décomposition opérée principalement par les altérations du fer qui y eût contenu, tandis que le second est produit par le mélange purement mécanique de deux principes déjà formés qui, brassés et pétris, pour ainsi dire, ensemble, forment un tout compacte, dur, serré et susseptible du plus beau poli.


IVe. Espèce. Pierre à chaux et silice.


Cette espèce n’est pas commune, elle est connue sous le nom de spath étoilé, stern schoerl des Allemands. Elle est opaque, et d’une forme ou tissu en rayons. M. Fichtel l’a trouvée dans la pierre à chaux sur les monts Carpathiens. Elle fait effervescence avec les acides ; et, suivant M. Bindheim, 100 parties de cette pierre en contiennent 66 carbonate de chaux, 30 silice et 3 de fer. V. Kirwan.

Le mélange des débris pulvérulens des roches primitives, transportés chez nous par les fleuves qui prennent leur source dans les Alpes et les Cevennes, avec nos dépouilles calcaires, forme souvent des couches d’une pierre de cette nature ; la seule différence qui y existe, c’est que nos mélanges présentent la confusion de tous les principes qui appartiennent aux roches primitives, tels que l’argile, la silice et autres.


Ve. Espèce. Pierre à chaux et bitume.


Ce mélange est connu sous le nom de pierre puante. Il abonde dans les diocèses d’Alais et d’Uzès : j’ai vu la roche calcaire imprégnée de bitume, dans une étendue de plus de trois lieues de rayon. Il y est même si abondant dans quelques parties, qu’il distille par les fentes des rochers et y forme des stalactites ou mamelons de bitume que les paysans ramassent pour marquer les bêtes à laine ou graisser leurs charrettes ; la chaleur de nos étés le ramollit quelquefois, à tel point, qu’il coule dans les champs, empâte et arrête le soc des charrues. Dans quelques endroits la pierre est assez bien imprégnée de bitume pour qu’on puisse la travailler ; le choc du marteau en fait exhaler une puanteur horrible. M. d’Avejan Évêque d’Alais, avoit employé cette pierre à paver les appartemens de son palais ; mais le frottement et la chaleur en dégageoient une odeur si désagréable, que ses successeurs ont été forcés de lui substituer de la pierre d’une autre espèce.

M. de Lapeyrouse a trouvé cette pierre, en grandes masses, près de Saint-Béal en Comminge, à l’Estagnau et au moulin de Langlade.


VIe. Espèce. Pierre à chaux et fer.


Le fer est presque toujours partie constituante de la pierre à chaux ; mais il est quelquefois dans une telle proportion, que ces mélanges forment des mines de fer. M. Kirwan en décrit deux de cette nature, dont l’une contient 25 livres de fer au quintal, et l’autre 10. M. Rinmann a décrit des stalactites qui fournissent du fer dans la proportion de 20 à 27 livres par quintal.

On exploite, dans plusieurs endroits de notre Province, des mines de fer calcaires. J’ai retiré moi-même 44 livres de fer par quintal, d’une pierre calcaire abondante sur la montagne de Frontignan.

Il est commun de rencontrer, dans nos montagnes calcaires, des hématites riches en fer, dont la base est calcaire ; on trouve aussi des espèces de ludus du même genre, quelquefois même des tufs, dont la formation n’est due qu’à des eaux chargées de fer et de chaux.

Les mines de fer spathiques rentrent dans la classe de celles dont nous venons de parler.


SECOND GENRE.


Mélanges baritiques.


Ces mélanges sont très-rares, parce que cette pierre l’est elle-même : nous ne ferons mention que de deux espèces.


Ire. Espèce. Sulfate de barite, pétrole, gypse, alun et silice. Bergmann, sciagr. reg. min. S. 90. Kirwan, élémens de minéralogie, p. 60.


C’est à ce mélange qu’on a donné le nom de pierre hépatique, lapis hepaticus.

La couleur varie beaucoup ; le tissu en est uniforme, lamelleux, écailleux ou spathique, cette pierre prend le poli de l’albatre.

Elle forme une espèce de plâtre par la calcination, et exhale par le frottement une odeur forte et puante.

100 parties de cette pierre contiennent 33 barite, 38 silice, 17 alun, 7 gypse, 5 pétrole.


IIde. Espèce. Carbonate de barite, fer et silice.


M. Kirwan a fait mention de cette pierre, d’après l’autorité de M. Bindheim ; elle est insoluble dans les acides, et d’un tissu spathique ; mais il est tenté de la regarder comme un sulfate de barite, d’après la propriété que lui a reconnue M. Bindheim, de devenir soluble dans les acides, après avoir été calcinée avec de l’huile.


TROISIÈME GENRE.


Mélanges magnésiens.


Toutes les espèces comprises dans ce genre ont des caractères assez frappans et reconnoissables ; elles sont, en général, graisseuses et douces au toucher ; on peut les entamer avec le ciseau, les travailler au tour, et leur donner toutes sortes de formes à volonté ; elles prennent un poli assez parfait ; quelques-unes sont disposées par fibres, et ces fibres jouissent, chez la plupart, d’une flexibilité remarquable ; elles happent la langue, comme les argiles, mais ne se ramollissent point dans l’eau comme elles.


Ire. Espèce. Magnésie pure, silice et alumine.


IIde. Espèce. Carbonate de magnésie, silice et alumine.


Le mélange de ces trois principes terreux forme les talcs, les stéatites, les pierres ollaires, etc.

La seule différence que l’analyse nous démontre entre ces deux espèces, n’existe guère que dans les proportions des principes constituans, ce qui paroîtroit nous autoriser à ne les considérer que comme des variétés l’une de l’autre ; mais, comme la magnésie est pure dans le talc, et à l’état de carbonate dans la stéatite, nous en ferons des espèces différentes.

1°. La magnésie pure, mêlée avec près de deux fois son poids de silice et moins que son poids d’alumine, forme le talc ; il est de couleur blanche, grise, jaune ou verdâtre, doux et savonneux au toucher, composé de lames transparentes, placées les unes sur les autres ; ces lames sont plus tendres et plus fragiles que celles du mica, elles s’égrennent et se divisent ordinairement en rhombes ; on peut les écraser et les rayer avec l’ongle.

Sa pesanteur spécifique est de 2,729.

Le feu le rend plus fragile et plus blanc, mais il est infusible au chalumeau, et à peine les alkalis peuvent-ils en procurer la fusion ; le borate de soude et les phosphates de l’urine le fondent avec un peu d’effervescence.

Le talc de Moscovie est composé de feuillets larges, élastiques, flexibles et transparens ; on a levé dans les carrières de Vitim, en Sibérie, des feuilles de talc qui avoient huit pieds en quarré.

2°. La stéatite est ordinairement d’un blanc verdâtre ; on peut l’entamer facilement avec le couteau ; la poussière qui en provient ne s’étend pas facilement dans l’eau.

Sa pesanteur spécifique est d’environ 2,433.

Elle est infusible par elle-même, durcit au feu et y blanchit ; le borate de soude en facilite la fusion ; la soude et les phosphates de l’urine ne la dissolvent qu’imparfaitement.

D’après l’analyse de Bergmann, 100 parties de stéatite contiennent 80 silice, 17 magnésie à l’état de carbonate, 2 alumine, 1 fer.

La stéatite est quelquefois en masse de forme indéterminée, et quelquefois crystallisée, telle que celle que M. Gerhard a trouvée à Reichewtein en Silésie. Chem. ann, 1785. Et M. de Romé de Lisle en possède des crystaux en lames hexagones comme les feuillets de mica.

La stéatite blanche de Briançon est composée de feuillets irréguliers, friables et demi transparens ; elle renferme souvent des crystaux de stéatite blancs ou verdâtres qui offrent des prismes tétraèdres.

La stéatite de Corse paroît formée par des fibres apposées les unes à côté des autres ; elle a une couleur verdâtre, et pas de flexibilité sensible.

La stéatite de Bareith est grise, compacte et solide.

Celle de la baie de la Reine Charlotte, dans la nouvelle Zélande, est striée, verte, demi-transparente, et assez dure pour étinceller par le choc du briquet.

3°. La pierre de lard de la Chine est une stéatite souvent striée, mais elle est plus onctueuse que celles dont nous venons de parler.

La stéatite de Briançon fait la base du rouge végétal.

4°. La pierre ollaire n’est qu’une variété de la stéatite ; elle ne me paroît en différer que parce qu’elle est plus dure.

Sa couleur est, pour l’ordinaire, grisâtre ; elle est encore, quelquefois, noircie par un bitume.

M. Gerhard a observé que la pierre ollaire de Suède faisoit effervescence avec les acides et contenoit de la terre calcaire ; mais ce mélange lui est particulier. Celles de Saxe, de Silésie et de Corse n’en contiennent point.

La pierre ollaire peut être travaillée avec la plus grande facilité : dans le pays des Grisons, en Corse et ailleurs, on la tourne, et on en fait des vases qui résistent au feu, et n’ont point les inconvéniens de nos poteries vernissées : ce sont ces usages qui lui ont fait donner le nom de pierre ollaire, pierre à pot, etc.


IIIe. Espèce. Magnésie pure combinée avec un peu plus que son poids de silice, un tiers d’alumine, près d’un tiers d’eau et plus ou moins de fer.


Ce Mélange forme la serpentine ; elle a beaucoup d’analogie avec les précédentes, mais elle se distingue, par une dureté plus marquée, par la propriété de pouvoir prendre un plus beau poli, et par une quantité de fer assez considérable pour lui donner un caractère particulier.

La serpentine est blanchâtre, verdâtre, bleuâtre ou noirâtre, souvent marquée par des taches noires, et quelquefois coupée par des bandes de diverses couleurs : Il y a même des serpentines transparentes : le cabinet royal des mines en possède un morceau dont le fond est gris et parsemé de taches rougeâtres, demi-transparentes et chatoyantes.

La serpentine varie encore par rapport à sa texture.

Elle est compacte, grenue, écailleuse, lamelleuse ou fibreuse.

Elle prend le plus beau poli.

Le fer y est quelquefois attirable à l’aimant.

Sa pesanteur spécifique est de 2,4 à 2,65.

Elle se fond à une chaleur violente, et durcit à un feu moindre.

M. Bayen qui a analysé la serpentine, a trouvé que 100 parties contenoient, 41 silice, 33 magnésie, 20 alumine, 3 de fer et de l’eau. M. Kirwan a observé que la serpentine de Corse contenoit plus d’alumine et moins de silice.

M. de Joubert possède une espèce de serpentine qui offre des lames quarrées à sa surface.

M. Dorthes a observé plusieurs variétés de serpentines sur les plages de notre méditerranée, et dans le fleuve d’Hérault qui les reçoit des montagnes des Cevennes.


IVe. Espèce. Carbonate de magnésie, silice, chaux, alumine et fer.


Cette combinaison nous présente quelques variétés qu’on connoît sous les noms d’asbeste, de liège de montagne : le tissu sert à les distinguer, mais l’analyse les confond, et n’y permet d’y entrevoir que des nuances ou variétés.

Première variété. Asbeste. Cette pierre est ordinairement verdâtre ; la texture en est quelquefois fibreuse et compacte, quelquefois membraneuse.

Près de Bagnères de Bigorre, dans les montagnes des environs de la Bassère, MM. Dolomieu et la Peyrouse ont trouvé des crystaux d’asbeste en parallélipipède rhomboïdal.

L’asbeste est rude au toucher, fragile et raboteux ; sa pesanteur spécifique est de 2,5 à 2,8.

Le feu le rend plus blanc et plus fragile ; il est infusible au chalumeau, selon Kirwan. Mais M. l’Abbé Mongéz assure que l’asbeste et l’amianthe se fondent et forment un globule opaque qui devient bleuâtre. Il se dissout difficilement avec la soude, plus aisément avec le borate de soude et les phosphates de l’urine.

Suivant Bergmann, l’asbeste contient, par quintal, 53 à 74 silice, environ 16 magnésie, 12 à 28 carbonate de chaux, 1 à 6 alumine, 1 à 2 de fer.

Seconde variété. Liège de montagne. Ce nom lui a été donné à cause de sa ressemblance grossière avec le liège.

Cette pierre est très-légère, membraneuse, flexible, ordinairement de couleur jaune ; on la déchire plutôt qu’on ne la brise : le diocèse d’Alais nous en fournit de très-belle.

Dans le grand nombre de pierres de cette nature soumises à l’analyse par le cél. Bergmann, la terre siliceuse a toujours dominé, ensuite la magnésie qui n’a jamais donné moins de jamais plus de 28.


Ve. Espèce. Carbonate de magnésie et de chaux, sulfate de barite, alumine et fer.

Cette combinaison forme l’amianthe ; elle est composée de longues fibres flexibles, parallèles entr’elles, très-douces au toucher.

Elles sont quelquefois très-blanches, souvent jaunâtres ; on peut séparer et détacher les filamens ; on peut même les tourner en tout sens, sans risque de les rompre : leur flexibilité est si étonnante qu’on peut en former des tissus. Les anciens en construisoient des toiles, dans lesquelles ils brûloient les cadavres ; par ce moyen on recueilloit les cendres sans mélange de celles du bûcher.

M. Dorthes a trouvé de l’amianthe en touffes sur des pierres calcaires rejetées par la mer, sur lesquelles elle étoit fixée avec des plantes, des corallines, des gorgonia, etc.… Il croit, avec raison, que cette amianthe n’a pas pris naissance sur ces pierres, mais qu’elle y a été déposée par l’eau.

Il a trouvé encore, sur la plage, des pelotes d’amianthe de deux à trois pouces de diamètre, imitant des ægagropiles, formées par l’entrelacement des fils d’amianthe, et recouvertes d’une substance topheuse blanche de la nature de celle qui recouvre les gorgonia, et qui est l’ouvrage d’une espèce d’animalcule marin.

Les fibres de l’amianthe sont plus ou moins longues ; on m’en a donné de Corse, dont les filamens très-flexibles ont huit pouces ; celle des Pyrénées est en filets plus courts.

Bergmann a analysé une amianthe de la tarantaise, dont 100 parties lui ont donné 64 silice, 18,6 magnésie, 6,9 de chaux, 6 sulfate de barite, 3,3 alumine, 1,2 de fer.


QUATRIÈME GENRE.


Mélanges alumineux.


Les pierres argileuses ou alumineuses sont assez communes ; elles n’ont très-souvent qu’une dureté moyenne, et peuvent se diviser dans l’eau ; mais, quelquefois, le mélange des principes est si intime, qu’elles ont une très-forte consistance.


Ire. Espèce. Alumine, silice, carbonate de chaux, et plus ou moins de fer.


Nous pouvons placer ici toutes les variétés d’argile : l’analyse y démontre assez constamment les principes dont le mélange forme cette espèce ; mais les proportions entre ces principes constituans varient tellement, que les variétés d’argile sont presque infinies. Indépendamment des principes ci-dessus énoncés, nous trouvons quelquefois de la chaux combinée avec l’argile, quelquefois même de la magnésie ; et on pourra aisément en faire des espèces différentes, à mesure que l’analyse de ces terres se perfectionnera.

Les mélanges argileux dont nous avons dessein de parler en ce moment, sont caractérisés par les propriétés suivantes. Ils happent fortement la langue, se dessèchent, durcissent et prennent du retrait au feu, se divisent et forment une pâte avec l’eau ; on peut les manier et les tourner aisément en cet état, etc. Les argiles où le principe siliceux est plus abondant, sont plus sèches, happent moins, se divisent dans l’eau moins complètement, et se gercent moins au feu et au soleil.

Presque toutes les argiles contiennent du fer ; et ce métal en est le principe colorant le plus commun. Depuis la couleur brunâtre où le fer est presque à l’état natif, jusqu’au rouge le plus foncé, tout est dû aux divers degrés d’altération de ce métal. Ces diverses altérations s’opèrent, ou à la surface du globe par l’action immédiate de l’air qui calcine le fer, ou bien dans les entrailles de la terre, et alors c’est à la décomposition de l’eau et à celles des pyrites, que nous devons rapporter ces effets. On peut suivre ce beau travail de la nature dans plusieurs couches pyriteuses de notre Province ; et on peut consulter, à ce sujet, mon mémoire sur le brun-rouge imprimé chez Didot par ordre de la Province.

Nous nous occuperons moins des diverses variétés d’argile, que des usages auxquels on les emploie : le premier de ces usages est de former la base des poteries.

On peut distinguer plusieurs espèces de poteries, qui ne different néanmoins que par le degré de finesse des terres qu’on emploie, et par les soins qu’on apporte dans les divers travaux qu’on fait sur elles.

1°. La poterie la plus commune se fait avec une argile quelconque, qu’on mêle avec du sable, pour la rendre plus poreuse et plus propre par ce moyen à supporter la chaleur.

Ces vases seroient perméables à l’eau si on n’y appliquoit un vernis.

Ces vernis se font ordinairement, ou avec la mine de plomb sulfureuse qu’on appelle alquifoux, ou avec la mine jaune de cuivre : à cet effet, on réduit ces matières en poudre, on les délaie dans l’eau et on y trempe le vase fortement desséché par une première cuisson ; le tissu du vase absorbe l’eau, tandis que sa surface se couvre d’une couche de cette mine broyée, alors on porte le vase au four, on le cuit, on vitrifie la mine sur la surface du vase, et c’est ce verre métallique qui fait le vernis des poteries, qui est jaune ou vert, selon le métal employé.

Ces vernis sont tous dangereux, puisqu’ils sont solubles dans les graisses, les huiles, les acides, etc.

On s’occupe, depuis long-temps, des moyens de remplacer ces vernis par d’autres qui ne présentent pas le même danger.

On peut, à l’exemple des Anglois, vitrifier la surface des poteries par le moyen du sel marin qu’on jette dans le brasier lorsque le four est au blanc : mais ce moyen est impraticable dans la plupart de nos fabriques, où le feu n’est pas assez actif.

J’ai essayé diverses méthodes pour vernisser les poteries ; et deux d’entr’elles m’ont assez réussi pour que je les publie : la première consiste à délayer la terre de Murviel dans de l’eau et à y tremper les poteries ; cela fait, on les fait sécher ; après cela, on les plonge dans une nouvelle eau, dans laquelle on a délayé du verre vert porphirisé ; cette couche de poussière vitreuse se fond avec l’argile de Murviel, et il en résulte un vernis très-uni, très-blanc et très-économique.

La seconde méthode consiste à tremper les poteries desséchées dans une forte dissolution de sel marin, et à les cuire ensuite. L’essai que j’en ai fait dans mes fourneaux me fait augurer qu’on peut l’employer dans les travaux en grand.

J’ai encore obtenu un vernis très-noir en exposant des poteries fortement chauffées à la fumée du charbon de pierre ; j’ai enduit plusieurs vases de cette manière, en jetant beaucoup de poussière de charbon dans un four où la poterie étoit au blanc ; l’effet en est encore plus complet, lorsque en ce moment on bouche, pour quelques minutes, les tuyaux d’aspiration des fourneaux.

J’ai fourni tous ces détails et beaucoup d’autres, dans un ouvrage présenté à la Société royale des Sciences de Montpellier ; j’y ai prouvé, d’après les résultats de mes expériences en grand, que le mélange mieux entendu de nos terres pouvoit nous fournir les plus belles et les meilleures poteries dans tous les genres.

2°. La fayance ne differe de la poterie dont nous venons de parler, que par le degré de finesse des terres employées, et la nature de la couverte ou vernis.

La couverte de la fayance, n’est, comme l’on sait, qu’un verre rendu opaque par l’intermède de l’oxide d’étain ; c’est ce verre qu’on appelle émail.

Pour faire le bel émail blanc des Fayanciers, on calcine ensemble 100 livres de plomb, 30 d’étain, 10 de sel marin et 12 de potasse purifiée : ce mélange calciné et fondu donne un bel émail, qu’on applique comme le vernis dont nous avons parlé.

Bernard de Palissy a excellé dans l’art de la fayancerie, et c’est à lui que nous devons nos premières connoissances en ce genre[1].

3°. La poterie la plus fine est connue sous le nom de porcelaine ; elle doit être blanche y transparente, d’un grain fin.

Les premières porcelaines ont été fabriquée dans le Japon et à la Chine.

Le célèbre Réaumur fit le premier un superbe travail pour imiter cette poterie ; mais trompé par la demi-transparence et le coup-d’œil vitreux de la porcelaine, il s’imagina que c’étoit une demi-vitrification, et ne s’occupa que des moyens d’arrêter à propos ou de faire rétrograder la vitrification ; il vint même à bout de son dessein, en remplissant des bouteilles de sable et de gypse et les exposant à un four de poterie. Je suis parvenu à produire le même effet, par un procédé très-différent quoique lié à la même théorie. Lorsque je concentre mes huiles de vitriol dans le verre vert de nos fabriques, la partie, de la cornue, qui est frappée continuellement par l’huile de vitriol qui se volatilise, blanchit et perd sa transparence ; ce phénomène a lieu constamment, lorsqu’on donne un degré de feu un peu plus fort qu’à l’ordinaire, la cornue conserve sa forme, mais tout l’alkali en est extrait, et il ne reste que le principe quartzeux d’une superbe couleur blanche, quelquefois étonné ou gercé comme la porcelaine du Japon. Comme la décomposition commence par la surface intérieure immédiatement frappée par les vapeurs, celle-ci est souvent blanchie et décolorée, tandis que l’extérieure est purement vitreuse, ce qui présente un contraste assez frappant, puisqu’en regardant la surface intérieure du verre, on voit une couche blanche accollée à une couche vitreuse, et ne formant par leur réunion que l’épaisseur du verre.

Le Père Dentrecolles envoya de la Chine les substances qui étoient employées à la fabrication de la porcelaine ; elles y sont connues sous les noms de kaolin et de petunzé. On trouva bientôt en France des substances analogues ; et nos établissemens de porcelaine ont atteint, en peu de temps, et même surpassé par le dessein et par les formes, ce qui étoit connu de plus beau dans ce genre. Aujourd’hui la fabrique de Sèves est, sans contredit, la première du monde ; rien n’égale la beauté des peintures, la régularité des desseins et l’élégance des formes qu’on donne aux vases qui sortent de cet attelier.

On peut distinguer quatre principales opérations dans la fabrication de la porcelaine ; 1°. la préparation, le mélange des terres et le travail de la pâte ; 2°. la première cuisson qui forme le biscuit ; 3°. l’application et la fusion du vernis ou de la couverte ; 4°. l’art de les peindre, ce qui demande une troisième cuisson pour mieux combiner, fondre et amalgamer les couleurs avec la couverte.

J’ai fabriqué moi-même de la très-belle porcelaine, avec le kaolin qu’on trouve, par veines, dans le granit de Saint-Jean-de-Gardonenque, et le feld-spath si commun dans nos montagnes des Cevennes.

La quantité de porcelaine qui se fabrique à la Chine est immense, puisqu’il y a 500 fours et près d’un million d’hommes occupés à Kingt-to-ching, Province de Kiansi.

Nos argiles ont encore d’autres avantages ; elles servent, dans les moulins à foulon, à dégraisser les étoffes ; la meilleure terre à foulon est lisse et savoneuse.

On donne le nom de terre à pipe à une argile blanche, qui conserve sa blancheur au feu et résiste à une chaleur violente.

Les terres sigillées sont des argiles auxquelles la superstition a donné des vertus chimériques ; on y appose un sceau pour tromper le public avec plus d’effronterie et de sûreté.

Presque toutes les marnes, sur-tout celles qu’on trouve par couches, m’ont paru composées de ces mêmes principes ; elles varient beaucoup par rapport à la proportion des principes constituans, et sur-tout par la craie qui y domine.


IIde. Espèce. Alumine, silice, magnésie pure et fer.


Le mica qui résulte du mélange de ces principes a été confondu, mal-à-propos, avec le talc : le mica est doux au toucher, mais non pas gras comme le talc ; il a en général une couleur plus brillante et moins terreuse, si je puis m’exprimer ainsi.

La couleur la plus ordinaire du mica est la blanche ou la jaune tirant sur le rouge ; mais on en a trouvé de verdâtre, de rouge, de brun, de noir, etc.

Sa texture varie aussi ; il est écailleux, lamelleux ou strié.

Il présente quelquefois la forme d’un segment de prisme hexagone.

On le trouve ordinairement mélangé avec le feld-spath, le quartz, le schorl, etc. il existe presque toujours dans les roches primitives.

Sa pesanteur spécifique est de 2,535 à 3,000 lorsqu’il est chargé de fer. Kirwan.

Le mica sans couleur est infusible ; il ne se dissout qu’en partie dans la soude, mais il s’y divise avec effervescence ; il se fond dans le borate de soude et les phosphates de l’urine avec peu d’effervescence.

Les micas colorés sont fusibles. V. de Saussures.

Les fragmens du mica sont employés sous le nom d’or ou d’argent de chat, selon la couleur, à sécher l’encre sur le papier.

La couleur jaune, qui imite assez celle de l’or, en impose chaque jour à des ignorans, qui croient avoir découvert une mine de ce métal précieux dès qu’ils ont trouvé quelques paillettes de cette pierre.

M. Kirwan a retiré de 100 parties de mica sans couleur, 38 silice, 28 alumine, 20 magnésie et 14 oxide de fer.


IIIe. Espèce. Alumine, silice, magnésie, chaux et fer.


Le mélange de ces principes forme la pierre de corne, horn-blend des Allemands.

Cette pierre est d’un grain serré, difficile à être broyée, s’aplatissant un peu sous le marteau.

Elle varie, par sa couleur qui est ou noire ou d’un gris verdâtre, et par son tissu qui est en général lamelleux ou strié.

Ses caractère généraux sont, une solubilité partielle dans les acides sans effervescence, une dureté qui ne va jamais jusqu’à donner des étincelles avec l’acier, une pesanteur spécifique qui n’est jamais au-dessous de 2,66 et s’élève souvent à 3,88, une forte odeur terreuse qu’elle exhale lorsqu’on respire dessus et qu’on l’arrose d’eau chaude, une ténacité qu’on éprouve en la pilant, etc. V. Kirwan.

M. Kirwan en a distingué deux variétés.


Première variété. Pierre de corne noire ; corneus nitens. Wallerius.


Son tissu est lamelleux ou grenu ; dans le premier cas, elle est quelquefois si molle, que l’ongle peut l’entamer : sa surface est souvent aussi luisante que si elle avoit été graissée ; sa pesanteur spécifique est de 3,6, à 3,88.

M. Kirwan a trouvé que celle qui a le tissu lamelleux contient par quintal 37 silice, 22, argile, 16 magnésie, 2 chaux, 23 oxide de fer.


Seconde variété. Pierre de corne d’un gris verdâtre.


Celle-ci est d’un tissu grenu ou strié, la pesanteur spécifique que lui a reconnue M. Kirwan est de 2,683 ; elle est plus dure que la précédente.

La pierre à aiguiser pâle verdâtre est de cette qualité ; elle est d’un tissu serré, exhale l’odeur terreuse, ne fait point effervescence avec les acides ni feu avec le briquet ; elle contient, selon M. Kirwan, 65 silice par quintal ; et sa pesanteur spécifique est de 6,664.


IVe. Espèce. Alumine, silice, carbonate de magnésie et de chaux et fer.


On voit que cette espèce qui comprend l’ardoise ou schiste ne diffère pas essentiellement de la précédente, puisque les principes sont les mêmes, et qu’il n’y a d’autre différence que celle que nous présente l’état de la chaux et de la magnésie qui, dans cette dernière, font une légère effervescence, selon Kirwan.

L’ardoise, est une pierre argileuse, dont le principal caractère est, de pouvoir se diviser en lames très-minces, susceptibles d’être taillées et de recevoir un certain poli.

La couleur de l’ardoise est d’un bleu plus ou moins foncé ; mais cette couleur varie et nous présente les nuances suivantes :


Première variété. Ardoise pourpre bleuâtre.


Elle est fragile et de tissu lamelleux ; elle n’étincelle pas au briquet ; sa pesanteur spécifique est de 2,876 ; elle rend un son très-clair et argentin lorsqu’elle est divisée en feuillets d’égale épaisseur ; elle fait légèrement effervescence avec les acides, lorsqu’elle est réduite en poudre, et non autrement.

À un feu violent elle forme des scories noires ; la soude en détermine la fusion, le borate de soude plus aisément encore.

M. Kirwan a retiré de 100 grains de cette ardoise 46 silice, 26 alumine, 8 magnésie, 4 carbonate de chaux, 14 fer.


Seconde variété. Ardoise noire.


Celle-ci reçoit un assez beau poli, quand on la racle ; la poussière qu’on en détache est blanche et fait un peu d’effervescence avec les acides.


Troisième variété. Ardoise bleue.


L’ardoise bleue contient moins de fer que la première, elle est ordinairement dure et d’un grain très-fin.


Quatrième variété. Ardoise d’un blanc pâle.


Elle est moins martiale que les autres variétés, et elle se vitrifie plus difficilement.

Les ardoises sont exploitées pour former des tables et recouvrir les maisons.


Ve. Espèce. Alumine, silice, pyrite ou sulfure de fer, et carbonate de chaux et de magnésie.


Le schiste qui résulte de cette combinaison est connu sous le nom de schiste pyriteux.

Les pyrites sont quelquefois dispersées dans la masse en crystaux cubiques ; quelquefois les pyrites ne s’annoncent que par l’analyse ou la décomposition spontanée de la pierre.

Les montagnes qui forment ces schistes me paroissent des dépôts de la mer ; on y trouve fréquemment des impressions de feuilles, des empreintes de poissons, et autres caractères qui ne laissent pas de doute sur leur origine.

La pyrite ne tarde pas à effleurir, lorsque le concours de l’air et de l’eau en favorise la décomposition, et il en résulte alors des sels sulfuriques, à base de magnésie, d’alumine, de fer, de chaux : lorsque le sulfate d’alumine y domine, on l’appelle schiste alumineux. Presque toutes les mines d’alun qu’on exploite dans l’Europe, sont de cette nature ; nous en avons plusieurs dans la Province qu’on pourroit travailler ; les schistes de Vebron dans le Gévaudan, ceux de Curvalle dans l’Albigeois, fournissent beaucoup d’alun par leur décomposition.

Lorsque le principe magnésien y domine, alors l’efflorescence est du sel d’epsom ; j’en ai fait connoître une montagne dans le Rouergue, dans le voisinage de Saint-Michel.

Ces efflorescences d’alun ou de sel d’epsom sont toujours mêlées avec des sulfates de fer et de chaux plus ou moins abondans, parce que l’acide sulfurique qui se forme par la décomposition de la pyrite, attaque et dissout tous les principes contenus dans le schiste.

On peut hâter la décomposition de ces pyrites, par l’exposition à l’air, la calcination, etc.


VIe. Espèce. Alumine, silice, carbonates de chaux et de magnésie, sulfure de fer, bitume.


Ce schiste ne diffère du précédent que pair le bitume dont il est imprégné.

Ce schiste a ordinairement une couleur noire qu’il doit à son bitume ; il a plus ou moins de consistance ; il se divise quelquefois par feuillets, sa surface est ou lisse ou raboteuse.

Ce sont ces schistes qui forment ordinairement le foyer des volcans : lorsque la décomposition y est favorisée par l’air ou l’eau, il s’excite une chaleur prodigieuse ; il se produit du gaz hydrogène qui fait effort contre les parois qui le retiennent, et prend feu dès qu’il a le contact de l’air : c’est ce travail intérieur qui occasionne les secousses et les tremblemens qui précèdent les éruptions volcaniques. Le jeu des volcans doit être d’autant plus long et plus terrible que l’aliment et le foyer en sont plus considérables.

On pourroit, à la rigueur, placer ici les mines de charbon, qui ne différent de ce schiste que parce que le principe bitumineux y est plus abondant. Nous voyons journellement s’établir des incendies dans le charbon pyriteux amoncelé ; nous les voyons se former dans l’intérieur même des filons qu’on exploite ; nous en avons plusieurs exemples dans le Royaume. Il existe même à Cransac, dans le Rouergue, un véritable volcan brûlant ; la montagne qui recèle le charbon est prodigieusement chaude ; et l’on apperçoit, de temps en temps, sur le sommet, des flammes qui s’échappent de l’intérieur : tous ces phénomènes tiennent à la même cause ; et, depuis le petit volcan artificiel de Lémery, jusqu’aux terribles éruptions du Vésuve, il n’y a d’autre différence que dans la grandeur de la cause.

Les principes terreux et métalliques qui sont la base des schistes bitumineux, fortement chauffés, et presque vitrifiés par la chaleur que produit leur décomposition, forment les produits volcaniques.


VIIe. Espèce. Alumine, silice, chaux et eau.


Cette pierre qu’on appelé zeolithe ne nous est connue que depuis que le célèb. Cronstedt nous en a donné la description.

Elle est ordinairement d’un blanc demi-transparent ; mais cette couleur est quelquefois altérée par des mélanges métalliques, et alors elle prend toutes sortes de teintes.

Le nom de zeolithe lui a été donné par rapport à la propriété qu’elle a de former une gelée avec les acides ; on a même regardé cette propriété comme exclusive et caractéristique ; mais M. Swab observa très-bien, en 1758, que toutes les zeolithes n’avoient pas cette propriété ; et M. Pelletier a prouvé, (journal de phys. t. 20) que cette propriété n’étoit même pas particulière aux zeolithes.

L’existence des zeolithes dans quelques laves, les a faites regarder, par quelques Naturalistes, comme la décomposition des terres volcanisées.

Les plus belles zeolithes blanches nous viennent des Isles de Ferroë en Islande. Cette pierre offre une forme constante ; les rayons qui la composent divergent comme d’un point central, et sont disposés en éventail. On apperçoit que le rayon y est terminé à la surface externe par une pyramide trihèdre ou tétraèdre.

La zeolithe blanche affecte deux formes principales, le cube, et le prisme tétraèdre, quelquefois aplati et terminé par une pyramide tétraèdre obtuse.

Sa pesanteur spécifique est de 2,1 à 3,15.

La zeolithe exposée à une chaleur forte se dilate et se gonfle plus ou moins selon la proportion d’eau qu’elle contient, et elle finit par se fondre en une scorie boursoufflée. La soude la fond avec effervescence, le borate de soude plus difficilement ; et les phosphates de l’urine n’ont presque pas d’action sur elle.

Bergmann a retiré de cent parties de la zeolithe rouge d’Adelfort 83 silice, 9,5 alumine, 6,5 chaux pure et 4 eau. Lettres sur l’Islande, p. 370.

La zeolithe blanche de Ferroë contient, suivant M. Pelletier, 50 silice, 20 alumine, 8 chaux, 22 eau. Journal de phys. t. 20.

Meyer a retiré d’une autre zeolithe radiée 58,33 silice, 17,5 alumine, 6,66 chaux, 17,5 eau.

M. Kirwan observe avec raison que les espèces crystallisées contiennent plus d’eau que les autres.


CINQUIÈME GENRE.


Mélanges siliceux.


Nous placerons dans ce genre toutes les pierres qui font feu avec l’acier.


Ire. Espèce. Silice, alumine, chaux et fer intimement combinés.


Le mélange de ces diverses terres forme les pierres précieuses ou gemmes ; la couleur, la dureté, l’éclat, la pesanteur, les proportions entre les principes constituans et leur combinaison plus ou moins intime, établissent toutes les variétés des gemmes.

Les nombreuses expériences du cél. Bergmann sur les pierres gemmes ont jeté le plus grand jour sur leur nature et leur composition : les analyses de MM. Gerhard, Achard, etc., en nous présentant une identité rigoureuse de principes, nous ont confirmé les résultats du fameux Chimiste Suédois ; et il paroît qu’il n’y a pas de doute raisonnable à former aujourd’hui contre ces principes.

Comme les pierres gemmes sont distinguées dans le commerce par leur couleur, nous conserverons cette distinction établie.


Première division. Pierres gemmes rouges, rubis, grenat, etc.


1°. Le rubis est une pierre précieuse d’un rouge de feu, électrique par le frottement, étincélant au briquet, la plus pesante des pierres précieuses et la plus dure. Il crystallise en pyramides hexaèdres, alongées, apposées base à base sans prisme intermédiaire.

Sa pesanteur spécifique est de 3,18, à 4,283.

Il ne se vitrifie point au feu sans addition ; il est même refractaire au miroir ardent ; l’oxigène le fond aisément, il ne perd point sa couleur au degré de chaleur qui fond le fer. Le borate de soude et les phosphates de l’urine le mettent en fusion.

100 parties de rubis contiennent, suivant Bergmann, 40 alumine, 39 silice, 9 chaux, 10 fer.

Les Lapidaires, pour qui la dureté et la transparence sont les principaux caractères des pierres, distinguent des rubis de diverses couleurs ; et les habitans du Pégu, qui considèrent les modifications du principe colorant comme différens degrés de maturité, confondent la topaze et le saphir sous le nom de rubis dont ils font trois variétés.

On donne le nom de rubis spinelle, ou celui de rubis balais, à la même nature de pierre, selon que la couleur est d’un rouge pâle ou d’un rouge foncé : ce rubis crystallise en octaèdres, et est moins pesant que le rubis oriental.

2°. Le grenat est transparent, quand il n’est pas surchargé de fer ; il est, en général, attirable à l’aimant et d’un rouge jaunâtre. Les formes du grenat paroissent dériver du parallélipipède rhomboïdal, terminé par six rhombes égaux.

Ils varient prodigieusement par la couleur, et ces variétés sont 1°. le rouge, le scarboucle de Théophraste, selon M. Hill. ; il est d’un rouge de sang foncé. 2°. Le grenat syrien, d’un rouge foncé, un peu mêlé de jaune ; 3°. le grenat violet, d’un beau rouge mêlé de violet.

Tous les grenats dits orientaux et occidentaux se rangent dans quelqu’une de ces trois classes.

Les grenats se changent au feu en un émail d’un rouge noirâtre ; le borate de soude et les phosphates de l’urine les attaquent fortement.

On trouve souvent le grenat en petits grains dans le grés ou le schiste.

Le tissu du grenat est lamelleux et sa cassure vitreuse.

Sa dureté est inférieure à celle des autres pierres gemmes, mais elle l’emporte sur le crystal de roche.

Sa pesanteur spécifique est de 3,6 à 4,188.

100 parties de grenat contiennent, selon M. Achard, 48,3 silice, 30 argile, 11,6 chaux, 10 fer.

Ils contiennent quelquefois de l’étain et même du plomb, mais cela est rare. Bergmann.


Seconde division. Pierres gemmes jaunes, topaze, hyacinthe, etc.


1°. La topaze est de couleur d’or ; on en connoit deux variétés principales, la topaze occidentale ou du Brésil, qui est d’un beau jaune d’or foncé, et l’orientale dont la couleur est plus tendre ; celle de Saxe se rapproche de cette dernière.

La topaze d’Orient ne perd ni sa couleur ni sa transparence au feu de porcelaine ; celle du Brésil perd son poli, sa dureté et sa transparence, mais sans y fondre.

La topaze d’Orient affecte une forme octaèdre.

Celle du Brésil crystallise en prismes tétraèdres rhomboïdaux et cannellés suivant leur longueur ; ils sont terminés par deux pyramides tétraèdres à plans triangulaires lisses.

Celle de Saxe présente des prismes oblongs sub-octaèdres, terminés par des pyramides hexaèdres, tronquées plus ou moins près de leur base.

La pesanteur spécifique de la topaze d’Orient est à celle de l’eau, comme 40106 est à 10000 ; celle de la topaze du Brésil, comme 353365 est à 10000. V. M. Brisson.

L’analyse de la topaze a fourni par quintal à Bergmann, 46 alumine, 39 silice, 8 carbonate de chaux, 6 fer.

2°. L’hyacinthe orientale est d’une couleur jaune rougeâtre.

Elle est ordinairement crystallisée sous la forme d’un prisme tétraèdre rectangulaire, terminé par deux pyramides quadrangulaires à plans rhombes.

Elle perd la vivacité de ses couleurs par le feu. M. Mongez la regarde comme infusible au chalumeau ; M. Achard prétend l’avoir fondue dans un fourneau à vent.

100 parties ont fourni à Bergmann, 40 alumine, 25 silice, 20 carbonate de chaux, 13 fer. Celle, dont M. Achard a donné l’analyse, contient 41,33 alumine, 21,66 silice, 20 carbonate de chaux, 13,33 fer.

On trouve des hyacinthes en Pologne, en Bohème, en Saxe, dans le Vélay, etc.

On désigne, sous le nom de jargon, l’hyacinthe blanchie au feu. Suivant M. Lavoisier, l’hyacinthe du Puy en Vélay blanchit au feu par le courant d’oxigène.

Sa pesanteur spécifique est à celle de l’eau, comme 36873 est à 10000. V. Brisson.


Troisième division. Pierres gemmes vertes, émeraude, chrisolite, béril, etc.


1°. L’émeraude du Pérou a une couleur verte ; elle est électrique par le frottement, et crystallise en prismes hexaèdres tronqués net aux deux extrêmités.

On a souvent confondu avec l’émeraude des jaspes ou des schorls verts qu’on appelle prase ou mère d’émeraude.

On trouve fréquemment les crystaux d’émeraude implantés dans des gangues de quartz et même de spath.

Suivant M. Sage, plus les émeraudes sont transparentes, moins leur couleur s’altère au feu ; elles y deviennent opaques et d’un blanc verdâtre ; il y en a qui se réduisent en émail à la surface.

M. Darcet assure que dans ses expériences l’émeraude a perdu sa transparence et une grande partie de sa couleur, mais qu’elle n’a rien perdu de sa forme. Dans les expériences faites à Vienne en Autriche, l’émeraude se fondit en vingt-quatre heures ; et à Florence le miroir ardent la fondit promptement. M. de Saussure la fondit au chalumeau en un verre gris compacte ; et M. Lavoisier au courant d’oxigène, en un globule opaque laiteux dont le dedans étoit verdâtre.

Sa pesanteur spécifique, par rapport à celle de l’eau, est dans la proportion de 27755 à 10000. Brisson.

100 parties ont fourni Bergmann 60 alumine, 24 silice, 8 chaux, 6 fer. Achard en a retiré 60 alumine, 21,26 silice, 8,33 chaux, 5 fer.

Les émeraudes qui viennent de l’Amérique sont appelées occidentales ; le Pérou et le Brésil fournissent les plus belles : on peut les distinguer par la couleur ; celle du Pérou est d’une couleur satinée, l’autre d’une couleur moins vive.

L’émeraude est la plus tendre des gemmes ; elle se laisse rayer par la topaze, le saphir, etc.

2°. La chrysolite ou péridot est d’un vert tirant un peu sur le jaune.

Sa forme est un prisme hexaèdre à côtés inégaux, assez souvent strié, et terminé par deux pyramides hexaèdres.

M. Sage assure que cette pierre exposée au feu le plus violent n’y a éprouvé aucune altération, la couleur n’en a même pas été dégradée ; et le même Chimiste prétend que Wallerius n’a pas opéré sur une véritable chrisolite, puisqu’il dit qu’elle y a perdu sa couleur. MM. Lavoisier et Erhmann l’ont fondue en un verre blanc, sale, mat, par le secours de l’oxigène.

La pesanteur spécifique de la chrisolite du Brésil est, par rapport à l’eau, dans la proportion de 26923 à 10000. V. Brisson.

On trouve dans les basaltes en prismes et dans quelques autres produits volcaniques des amas de chrisolite granuleuse, dont la couleur est plus ou moins verte. Ces chrisolites sont communes dans les volcans de notre Province. M. Sage a reçu d’Auvergne un prisme hexagone de six pouces de diamètre, formé d’un amas de chrisolites de différente couleur.

3°. Le béril ou aigue-marine est d’un vert très-bleuâtre.

Celui de Saxe, de même que celui de la Sibérie, envoyé à M. Sage par M. Pallas, offre des prismes hexaèdres tronqués et striés, dont le tissu est lamelleux.

Le béril pur éclate au fou, y perd de sa transparence, et se fond au chalumeau.

Sa pesanteur spécifique est, par rapport à l’eau, dans la proportion de 35489 à 10000, pour l’aigue-marine orientale ; et de 27227 à 10000, pour l’occidentale. V. Brisson.

On rencontre dans les granits d’Espagne, et du côté de Saint-Symphorien près de Lyon, une aigue-marine bleue en longs prismes tétraèdres aplatis, feuilletés suivant leur longueur, et réunis en faisseaux. Cette pierre est très-commune à Baltimore en Amérique.


Quatrième division. Pierres gemmes bleus, Saphir.


La couleur du saphir est bleu de ciel ; les saphirs du ruisseau d’Expailly ont une teinte verte, ils s’altèrent au feu de même que ceux du Brésil, tandis que le saphir oriental n’éprouve pas de changement dans nos fourneaux ordinaires. M. Erhmann a vu couler, en un globule blanc mat le saphir oriental clair et d’un bleu formé, à un feu excité par l’oxigène. Les expériences de MM. Achard, Sage, Darcet, Erhmann, Lavoisier, Geyx, Quist, etc. nous présentent une variété de résultats, dans l’analyse des gemmes par le feu, qu’on ne peut attribuer qu’à la manière dont ils l’ont appliqué, et sur-tout à la nature très-variable des pierres qu’ils ont essayées.

Le saphir d’Orient et celui du Puy offrent deux pyramides hexaèdres fort alongées, jointes et opposées base à base sans prisme intermédiaire. M. Sage a vu un saphir en cube rhomboïdal.

Le saphir analysé par Bergmann, lui a donné par quintal 58 alumine, 35 silice, 5 chaux, 2 fer.

M. Achard obtenu de son analyse 58,33 alumine, 33,33 silice, 6,66 chaux, 3,33 fer.

La pesanteur spécifique du saphir du Puy est, par rapport à l’eau, comme 40769 à 10000. Celle du saphir oriental blanc, comme 39911, et celle du saphir du Brésil 31307. V. Brisson.


IIde. Espèce. Silice quelquefois pure, mais plus souvent mêlée avec une très-petite quantité d’alumine, de chaux et de fer.


Cette espèce comprend essentiellement le quartz et le crystal de roche.

On donne le nom de quartz à la pierre vitrifiable opaque ou informe, et celui de crystal de roche à cette même pierre crystallisée. Comme les principes sont à-peu-près les mêmes, il s’établit naturellement une division de ces pierres en deux classes.


Première division. Crystal de roche.


Le crystal de roche est la pierre qui nous a présenté jusqu’ici la silice dans un état le plus approchant de la pureté ; M. Gerhard en a même trouvé où elle étoit parfaitement pure ; mais 100 parties de crystal rigoureusement analysées par Bergmann lui ont fourni 93 silice, 6 alumine, 1 chaux.

La forme ordinaire du crystal de roche est celle d’un prisme hexaèdre terminé par des pyramides d’un égal nombre de côtés : les variétés que présentent les divers crystaux peuvent être ramenées à cette forme géométrique. V. M. de Lisle.

Le quartz crystallise aussi en cubes : cette forme existe dans plusieurs échantillons des cabinets d’Allemagne, et M. Macquart en a porté un échantillon en France.

Il paroît que la formation de ce crystal est due à l’eau, puisque nous retrouvons souvent ce fluide dans l’intérieur des crystaux, et qu’ils se forment évidemment dans les fentes et cavités des roches primitives par le concours de cet agent ; mais nous avons, jusqu’ici, peu de connoissances sur les circonstances de cette opération.

Bergmann a obtenu des crystaux de roche en faisant dissoudre de la silice dans l’acide fluorique et laissant évaporer lentement. J’avois abandonné sur les tablettes de mon cabinet de minéralogie un récipient et une cornue dans lesquels j’avois fait l’acide fluorique ; et lorsque, deux ans après, j’ai eu occasion de revoir cet appareil, j’ai trouvé le récipient presque tout dévoré, et sa surface intérieure tapissée d’une poudre subtile dans laquelle on peut distinguer des milliers de crystaux de roche.

M. Achard avoit annoncé qu’il avoit formé des crystaux de roche en faisant filtrer de l’eau imprégnée d’acide carbonique à travers l’argile : M. Magellan présenta même de ces crystaux à l’Académie de Paris ; mais l’expérience répétée avec le plus grand soin par divers Chimistes de la Capitale, n’a point eu les mêmes résultats.

Depuis cette époque, M. de Morveau ayant enfermé des crystaux de roche avec un barreau de fer dans un flacon rempli d’eau gazeuse, a apperçu un point vitreux fixé au fer qu’il a cru être un crystal de roche formé par cette opération ; de sorte qu’il regarde le fer comme un intermède nécessaire pour que l’acide carbonique dissolve le quartz : cette conséquence de M. de Morveau paroît d’accord avec nombre de faits qu’on a recueillis sur la formation du crystal de roche : nous le voyons en effet se former dans les terres ochreuses ; et j’ai des ochres dans ma collection qui présentent beaucoup de ces petits crystaux à deux pointes.

Il me paroît qu’il n’est pas nécessaire de rechercher un dissolvant de la silice pour expliquer la formation du crystal de roche ; la simple division de cette terre me paroît suffire, et je pourrois appuyer cette assertion sur des faits nombreux. V. article crystallisation.

Il est prouvé par les observations et les expériences de M. de Genssane, qu’il se forme du gurh quartzeux, par simple transudation, sur les roches de cette nature ; et le même Naturaliste a vu que lorsque le gurh est charrié et déposé par l’eau, il forme des crystaux de roche. Les eaux qui suintent à travers les roches quartzeuses de la mine de Chamillat, proche de Planche les mines en Franche-Comté, forment des stalactites quartzeux au ciel des travaux et même sur les bois ; les extrémités de ces stalactites, qui n’ont pas encore pris une consistance solide, offrent une substance grenue et crystalline qu’on écrase facilement entre les doigts.

Dans ces cavités, appelées craques par les Mineurs, on trouve souvent du gurh coulant, et plus souvent encore des crystaux déjà formés : j’ai vu à Saint-Sauveur, travail de la Boissière près Bramebiaou, plusieurs plaques de gurh sur les parois de la galerie, et ces plaques étoient terminées par des crystaux bien fermés, dans tous les endroits où le mur rentroit et s’éloignoit de la perpendiculaire ; ce gurh, manié et bien examiné, ne m’a présenté qu’une pâte de silice assez pure.

Il en est des crystaux de roche, comme de ceux de spath calcaire ; ils se forment, toutes les fois que leurs principes fortement divisés et atténués sont charriés par l’eau et déposés avec toutes les circonstances que demande la nature pour que la crystallisation ait lieu.

Je ne crois même pas qu’il faille recourir à la propriété qu’a l’eau de dissoudre sensiblement la silice pour expliquer la formation de ces crystaux, et nous rapporterons à la même cause celle des stalactites quartzeux, des agathes, etc.

Le crystal de roche est souvent coloré par le fer, et il prend alors des nuances particulières qui l’ont fait désigner sous des noms différens. Nous les placerons ici comme de simples variétés l’un de l’autre.

Première variété. Crystal rouge, faux rubis.

Il est souvent mêlé de différentes teintes ; la couleur se détruit au feu, selon M. Darcet. On le trouve en Barbarie, en Silésie, en Bohème, etc.

Lorsqu’il est d’un rouge sale on l’appelle hyacinthe de Compostelle.

Seconde variété. Crystal jaune, topaze de Bohême.

Il a quelquefois une teinte tirant sur le jaune, souvent il n’est coloré qu’à l’intérieur. On le trouve dans le Vélay, près de Bristol en Angleterre, etc.

Troisième variété. Crystal rembruni, topaze enfumée.

Cette teinte de brun varie depuis le brun clair jusqu’au noir foncé. On assure qu’il est possible de les éclaircir en les faisant bouillir avec du suif. V. Journal de Physique, tom. 7, pag. 360. On en trouve en Suisse, en Bohème, en Dauphiné, etc.

Quatrième variété. Crystal verd, fausse émeraude.

C’est le plus rare et le plus précieux des crystaux colorés ; la Saxe et le Dauphiné en fournissent.

Cinquième variété. Crystal bleu, saphir d’eau.

Il ne paroît différent du vrai saphir que par son manque de dureté : j’en ai vu qui en avoient la couleur ; on en trouve en Bohème, en silésie et au Puy en Vélai, ce qui l’a fait nommer saphir du Puy.

Sixième variété. Crystal violet, amethiste.

La couleur en est plus ou moins foncée ; il prend par le poli un éclat brillant. Quand le crystal n’est coloré qu’à demi, on l’appelle prime Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/112 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/113 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/114 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/115 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/116 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/117 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/118 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/119 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/120 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/121 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/122 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/123 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/124 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/125 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/126 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/127 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/128 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/129 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/130 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/131 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/132 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/133 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/134 Page:Chaptal - Élémens de chimie, 1790, Tome 2.djvu/135


  1. Je ne puis pas me refuser à placer ici quelques traits de la vie malheureuse de ce grand homme qui vivoit dans le quinzième siècle : natif du diocèse d’Agen, il fut d’abord employé à lever des plans ; mais le goût de l’histoire naturelle l’arracha à ces premières occupations, et il parcourut, pour s’instruire, tout le Royaume et la basse Allemagne. Le hazard lui fit tomber entre les mains une coupe de terre émaillée ; et, dès ce moment, tout son temps et toute sa fortune furent employés à la recherche des émaux : rien de plus intéressant que le récit qu’il nous fait lui-même de ses travaux ; il se peint, construisant et reconstruisant ses fourneaux, toujours près du succès, desséché par le travail et la misère, devenu la risée publique, l’objet de la colère de sa femme et réduit à brûler les tables et les planchers de sa maison pour alimenter ses fourneaux ; un Ouvrier lui demande de l’argent, il se dépouille et lui donne ses vêtemens ; mais enfin, à force de travail, de constance et de génie, il parvint au degré de perfection qu’il ambitionnoit ; il eut alors l’estime et la considération des grands Seigneurs de son siècle. Il fut le premier à former un cabinet d’histoire naturelle à Paris ; il y donnoit même des leçons de cette science, moyennant un petis écu de chaque auditeur, s’obligeant à rendre le quadruple si on le trouvoit menteur. La gloire qu’il s’étoit acquise, les obligations que lui avoient ses compatriotes, ne purent point le garantir des persécutions de la ligue, et Matthieu de Launay, l’un des plus fanatiques, le fit traîner à la Bastille à l’âge de 90 ans ; il se signala encore dans sa prison par des actes de fermeté et d’héroïsme. Henri III ayant été le trouver, lui dit : « mon bon homme, si vous ne vous accommodez sur le fait de la religion, je suis contraint de vous laisser entre les mains de mes ennemis. » Palissy répondit : « Sire, j’étois bien tout prêt de donner ma vie pour la gloire de Dieu ; si c’eût été avec quelque regret, certes, il seroit éteint en ayant oui prononcer à mon grand Roi de France je suis contraint ; c’est ce que vous, Sire, et tous ceux qui vous contraignent ne pourrez jamais sur moi, parce que je sais mourir, et que tout votre peuple ni vous ne sauriez contraindre un Potier à fléchir le genou devant ses statues. » C’est Bernard de Palissy qui a le premier avancé que les montagnes calcaires n’étoient que des débris de coquilles. Il a montré, dans tous ses écrits, une telle sagacité, qu’on doit le placer parmi les grands hommes qui illustrent la nation. La forme même de ses ouvrages annonce un génie original ; ce sont des dialogues entre théorique et pratique, et c’est toujours pratique qui instruit théorique, écolière abondante en son sens, indocile et ignorante.