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Élise Duménil/Avertissement

La bibliothèque libre.
Chez Giquet et Cie (p. 11-12).

AVERTISSEMENT.


Je n’ose point réclamer l’indulgence du public : quoique ce soit la première production d’une femme, quoique mes amis m’aient presque forcée de la mettre au jour, je sens que le lecteur ne doit point entrer dans ces considérations.

On trouvera probablement cet ouvrage sérieux, triste, et même lugubre : un ancien a dit : « Celui qui n’a jamais pleuré, n’a pas acquis le droit de rire. »

On verra quelques lettres sur l’Angleterre, que le plan de cet ouvrage a obligé d’y insérer. Une Française, parler de l’Angleterre ! en parler avec impartialité ! cette tâche étoit difficile. Il ne falloit point flatter, il ne falloit point déplaire ; il falloit dire la vérité : fout cela étoit embarrassant. En voyant les passions, les foiblesses, les préjugés des hommes en société, un observateur impartial doit pencher vers la critique. J’ai fait lire à quelques amis mes observations sur l’Angleterre. Mes amis anglais m’ont accusée de partialité envers mes compatriotes ; mes amis français m’ont accusée d’être Anglomane : c’étoit-là le problême que j’avois à résoudre. Les vérités morales tenant le milieu entre les extrêmes, j’en ai conclu que j’avois atteint le but que je me proposois.

Dans la partie qui concerne les arts, les monument, et ce qui peut y avoir rapport, il y a des observations qui sont au-dessus de la portée et des connoissances d’une femme : j’ai consulté sur cette matière l’auteur de l’Essai sur les causes de la perfection de la sculpture antique[1]; connaissant son goût et son jugement, je m’en suis rapportée à lui.

Quant au plan de l’ouvrage et au caractère des personnages, si quelqu’un trouvoit qu’ils ne sont pas vraisemblables, j’en serois fâchée pour lui, car tout est vrai, à quelques circonstances près, de peu d’importance.

  1. Par le chevalier Louis de Giulier.