Étude sur la convention de Genève pour l'amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne (1864 et 1868)/02/09

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Art. 9. Les hautes Puissances contractantes sont convenues de communiquer la présente Convention aux gouvernements qui n’ont pu envoyer des plénipotentiaires à la Conférence internationale de Genève, en les invitant à y accéder ; le protocole est à cet effet laissé ouvert.

Art. 10. La présente Convention sera ratifiée, et les ratifications en seront échangées à Berne, dans l’espace de quatre mois, ou plus tôt si faire se peut.

Art. 15. (Additionnel.) Le présent acte sera dressé en un seul exemplaire original qui sera déposé aux archives de la Confédération suisse.

Une copie authentique de cet acte sera délivrée, avec l’invitation d’y adhérer, à chacune des Puissances signataires de la Convention du 22 août 1864, ainsi qu’à celles qui y ont successivement accédé.

§ 1. Les articles 9 et 10 ne comportent pas d’autre commentaire que le récit des formalités postérieures à la clôture de la Conférence de 1864, et la liste des ratifications et adhésions des diverses puissances. C’est donc à cela que se borneront les éclaircissements qui vont suivre.

Les hautes Puissances contractantes qui ont signé la Convention à Genève le 22 août 1864 sont au nombre de douze, savoir :

xxxxxxxxxxxxxxx Bade France Portugal
Belgique Hesse-Darmstadtxxxxx Prusse
Danemarkxxxxx Italie Suisse
Espagne Pays-Bas Wurtemberg

Les États-Unis d’Amérique, la Grande-Breagne, la Saxe royale et la Suède avaient eu aussi dans la Conférence des représentants, qui avaient participé à toutes les délibérations, mais qui, n’étant pas munis du pouvoir de signer, durent se récuser lorsque leurs collègues se réunirent pour cela.

Au 22 décembre 1864, dernier délai fixé par l’article 10 pour l’échange des ratifications, huit États seulement furent en mesure d’y procéder.

Les voici dans l’ordre chronologique de leurs ratifications.

--------------- France, 22 sept.------ Italie,  4 déc.
Suisse, 10 oct. Espagne,  5   »
Belgique, 14  » Danemark,--- 15  »
Pays-Bas,--- 29 nov. Bade, 16  »

L’échange eut lieu entre eux à Berne, et ils reportèrent le terme de rigueur, pour leurs co-contractants, au 22 mars 1865.

Le 15 mars, le Conseil fédéral suisse, sachant que les intéressés n’étaient pas encore prêts, fit agréer un nouvel ajournement au 22 juin.

À cette dernière date, cependant, la Prusse seule d’entre les retardataires vint au rendez-vous. La Hesse et le Wurtemberg avaient dé­claré ne pouvoir se prononcer définitivement qu’après une résolution préalable de la Diète germanique, laquelle, par parenthèse, n’eut pas le temps d’être prise avant le moment où le lien fédéral fut rompu. En Portugal, des événements politiques n’avaient pas permis jusqu’alors au Corps législatif, qui venait d’être dissous, d’autoriser le gouvernement à ratifier la Convention.

Malgré ces abstentions on passa outre à l’échange avec la Prusse, les trois puissances. que l’on se voyait forcé d’abandonner pour ne pas reculer indéfiniment l’heure où la Convention deviendrait exécutoire, ayant encore la ressource de s’y rallier comme adhérents, au même titre que celles qui n’avaient pu envoyer des plénipotentiaires à la Conférence internationale de Genève.

§ 2. Il avait été décidé, dès la réunion du 22 décembre 1864, que les adhésions données en vertu de l’article 9 « demeureraient aux archives de la Confédération suisse, qui en délivrerait expédition, dûment certifiée et scellée, à chacune des Puissances contractantes, et que chaque puissance répondrait ministériellement au nom du souverain. »

Le nombre des signatures que l’on espérait voir s’ajouter ainsi à celles des neuf gouvernements, qui avaient été finalement parties dans l’acte lui-même, étaient au nombre de dix-sept.

Quatre d’entre elles avaient déjà été notifiées à Berne avant le 22 juin 1865, savoir :

Suède et Norvège, 13 décembre 1864.
Grèce, 5-17 janvier 1865.
Grande-Bretagne, 18 février 1865.
Mecklembourg-Schwerin, 9 mars 1865.
La Turquie suivit de près, le 5 juillet 1865.

Puis le statu quo se prolongea, pendant un an, jusqu’au moment où la guerre d’Allemagne fut, pour plusieurs puissances, une occasion décisive de se prononcer.

Le Wurtemberg (2 juin 1866), la Hesse (22 juin) et la Bavière (30 juin) las d’attendre une décision de la Diète, adhérèrent d’urgence comme États souverains.

L’Autriche, qui devait devenir l’un des partisans les plus zélés de la Convention, était dans ce temps-là moins pressée d’y donner son consentement. Elle ne s’y résolut qu’après ses expériences de la campagne de Bohême, le 21 juillet 1866.

La même année vit encore arriver l’adhésion du Portugal (9 août) et celle de la Saxe royale (25 octobre) qui, elle aussi, avait longtemps attendu en vain que la Diète germanique voulût bien l’autoriser ou adhérer pour le compte de la Confédération tout entière.

Les deux dernières signatures recueillies furent celles de la Russie (10-22 mai 1867) et des États pontificaux (9 mai 1868). La Russie ainsi que l’Autriche, avait d’abord déclaré que « son service sanitaire suffisait à toutes les exigences, » et avait cru trouver dans ce fait une raison valable pour s’abstenir. Quant à l’accession du saint-siége, elle fut motivée « surtout par le désir que l’assistance religieuse soit apportée aux blessés d’une manière plus facile et plus régulière. »

Enfin quatre puissances, mises en demeure d’adhérer, ne s’y sont point décidées. Ce sont le Hanovre, qui a cessé d’exister, puis le Mexique, le Brésil et les États-Unis d’Amérique, quoique ces derniers aient, comme nous l’avons dit, envoyé des délégués à la Conférence.

La Convention lie donc aujourd’hui vingt-deux Gouvernements européens, dont neuf sont des parties contractantes et treize des adhérents.

§ 3. Cela n’est vrai, toutefois, que pour le texte de 1864. Les articles additionnels ont eu des destinées différentes que nous allons raconter brièvement.

La Conférence de 1868, réunie pour compléter un traité préexistant, se trouva fort embarrassée quant au caractère à donner à ses résolutions. En l’absence d’une partie des signataires de la Convention elle n’avait pas qualité pour en modifier le texte ; aussi fut-on vite d’accord pour le laisser intact ; les droits acquis furent sauvegardés et l’on convint de n’y revenir que pour les étendre.

Mais ici deux opinions se trouvèrent en présence. Parmi les membres de l’assemblée les uns entendaient faire, en vertu du mandat qu’ils avaient reçu, un acte diplomatique régulier, une sorte de Convention complémentaire de la première, et pour laquelle on procéderait de même : c’est-à-dire que ceux qui pourraient le signer d’emblée le feraient, sous réserve de ratification, tandis que les autres, présents ou absents, auraient la faculté d’y adhérer plus tard. Les deux Conventions successives n’étant nullement contradictoires, il semblait qu’ainsi l’on mettrait tout le monde à l’aise, et qu’il ne résulterait aucune difficulté pratique du fait que tous les signataires de la Convention n’apposeraient pas leur sceau sur l’acte supplémentaire. — D’autres puissances avaient donné à leurs délégués des pouvoirs moins étendus, pensant que des articles additionnels quels qu’ils fussent, dès qu’ils se référaient à une Convention antérieure, ne devaient émaner que de la volonté unanime de ceux qu’elle obligeait. D’après ce système, la Conférence n’étant pas au complet, ne pouvait rédiger qu’un Projet, lequel serait susceptible de revêtir ultérieurement la forme diplomatique, s’il obtenait l’assentiment de tous les intéressés.

Cette dernière théorie prévalut, et ce qui contribua à lui rallier tous les suffrages, ce fut la perspective de pouvoir, en l’adoptant, entraîner même les Gouvernements les plus circonspects. Tous les assistants, en effet, grâce à cette concession, ont mis leur cachet et inscrit leur nom au bas des décisions de la Conférence. Celles-ci ont gagné de la sorte en autorité morale, bien plus qu’elles n’ont perdu en valeur légale et, pour un traité qui n’a d’autre sanction que celle de l’opinion publique, c’était une considération de premier ordre que d’attester, d’une manière irrécusable, qu’il répondait à un besoin universellement senti.

Les États contractants sont :

--------------- Allemagne du Nord,----- Grande-Bretagne,
Autriche, Italie,
Bade, Pays-Bas,
Bavière, Suède et Norwège,
Belgique, Suisse,
Danemark, Turquie,
France, Wurtemberg.

Ces quatorze puissances représentent seize des signataires de la Convention, l’Allemagne du Nord comprenant à elle seule la Prusse, le Mecklembourg et la Saxe.

Il est peu probable que celles qui n’avaient envoyé personne à Genève refusent d’approuver les articles additionnels, car la plupart d’entre elles ont manifesté d’avance, à cet égard, les meilleures dispositions. Signés le 20 octobre 1868, ces articles ont été communiqués par le Conseil fédéral, sous la date du 2 novembre, avec l’invitation d’y adhérer, aux puissances signataires ainsi qu’à l’Espagne, aux États-Romains, à la Grèce, au Portugal et à la Russie.

Lorsque tous ces États auront répondu favorablement, on régularisera ce complément de la Convention dont, pour le moment, il n’existe qu’un seul exemplaire original déposé aux Archives de la Confédération Suisse. Mais il est certain que d’ici là, s’il surgissait un conflit, les belligérants s’y conformeraient et en feraient spontanément, entre eux, l’objet d’une convention particulière.