Évangile d’une grand’mère/73

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Librairie de L. Hachette et Cie (p. 200-202).

LXXIII

MARTHE ET MARIE. LES DEUX PARTS.



Jésus, étant en chemin avec ses disciples, entra dans le bourg de Béthanie, où demeurait Lazare que Jésus aimait, avec ses sœurs Marthe et Marie-Madeleine. Notre-Seigneur entra dans la Maison de Lazare ; et pendant que Marthe se donnait beaucoup de mouvement pour préparer le logement et le souper de Notre-Seigneur, Marie se tenait à genoux aux pieds du Seigneur et l’écoutait parler.

Marthe vint trouver Jésus et lui dit :

« Seigneur, ne voyez-vous pas que ma sœur me laisse tout faire toute seule ? Dites-lui donc qu’elle vienne m’aider. »

Le Seigneur lui répondit :

« Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu te troubles de beaucoup de choses. Or, une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera point ôtée. »

Louis. Je trouve cependant que Marthe avait raison de se

Marthe et Marie.
Marthe et Marie.


plaindre que Marie-Madeleine ne l’aidât pas. Car enfin, c’était pour que Notre-Seigneur fût bien logé et qu’il eût un bon souper que Marthe se donnait tant de mal.

Grand’mère. Aussi Notre-Seigneur ne la blâme pas. Il lui fait seulement remarquer que les choses dont elle se tourmente tant, sont bien peu importantes. Il lui dit qu’une seule chose est nécessaire.

Jacques. Et il ne lui dit pas ce que c’est.

Grand’mère. Il l’indique en ajoutant que Marie a choisi la meilleure part, qui est de rester près de lui, de l’écouter et de profiter de ses paroles. Et il ne veut pas l’obliger à renoncer à ce bonheur.

Jacques. Alors la pauvre Marthe a dû continuer à tout préparer toute seule ?

Grand’mère. Elle ne manquait pas de serviteurs pour exécuter ses ordres, car Lazare était riche. Notre-Seigneur veut lui donner une leçon comme à nous, pour nous empêcher de nous tant tourmenter, nous tant agiter pour les choses de ce monde, quelquefois au point de n’avoir plus le temps de nous occuper des choses de Dieu.

Jacques. Mais il fallait bien qu’on préparât ce qui était nécessaire pour recevoir Notre-Seigneur ?

Grand’mère. Oui, mais pas en le négligeant lui-même. Ainsi Marthe abandonnait Notre-Seigneur pour lui préparer un bon repas dont il ne se souciait pas, et une chambre bien arrangée qui lui était fort indifférente.

Jeanne. C’est vrai ça ; elle aurait dû se contenter de donner ses ordres à ses serviteurs, et puis aller écouter parler Jésus comme faisait sa sœur.

Grand’mère. Ce reproche que Marthe faisait à Madeleine et auquel répond si nettement Notre-Seigneur, est encore celui que les gens du monde adressent souvent aux religieux et aux religieuses. Ils prétendent que les religieux et religieuses sont inutiles ; et Notre-Seigneur est là pour répondre qu’ils ont choisi la meilleure part, et que ce qu’ils font est beaucoup plus utile que ce qu’ils ne font pas.